Volume 2 : Vers de nouveaux sommets : les intérêts et l'avenir du Canada dans l'espace – Novembre 2012

Table des matières


Lettre au ministre

L'honorable Christian Paradis
Ministre de l'Industrie

Monsieur le Ministre,

J'ai l'honneur de vous présenter Vers de nouveaux sommets : les intérêts et l'avenir du Canada dans l'espace, deuxième volume du rapport que j'ai produit conformément au mandat qui m'avait été confié en tant que chef de l'Examen des programmes et des politiques de l'aérospatiale et de l'espace. Le premier volume, intitulé Au-delà de l'horizon : les intérêts et l'avenir du Canada dans l'aérospatiale, porte sur le secteur de l'aérospatiale.

L'objectif global de ce volume est de décrire les fondements d'un programme spatial canadien qui aidera à exploiter les richesses du pays, améliorera les services publics, appuiera la pérennité de l'environnement et assurera la sécurité publique. Le Canada a été l'un des premiers pays dans l'espace; au cours des décennies à venir, notre prospérité et notre sécurité reposeront plus que jamais sur la conception, la fabrication et l'exploitation d'un éventail optimal d'actifs et services spatiaux.

Je me suis attaché à produire un rapport novateur et pratique fondé sur des données probantes et axé sur les tendances à long terme de l'industrie à l'échelle mondiale. Le rapport résume les constatations issues de l'Examen, et énonce les grandes orientations stratégiques. Nombre des renseignements détaillés qui sous-tendent son analyse et ses recommandations sont tirés des rapports des groupes de travail, des rapports de recherche et des mémoires affichés sur le site Web de l'Examen.

Cela fut pour moi un honneur de diriger l'Examen de l'aérospatiale. J'espère que les conseils formulés dans ces volumes s'avéreront utiles au gouvernement, et je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de mener cet Examen.

Je vous prie, Monsieur le Ministre, de bien vouloir accepter mes salutations distinguées.

David Emerson


Chef et conseillers de l'examen

Chef de l'Examen de l'aérospatiale

Photo du chef de l’Examen David Emerson.

Membres du conseil consultatif


Remerciements

Un processus d'élaboration de politiques comme l'Examen de l'aérospatiale requiert la participation d'un grand nombre de spécialistes et d'intervenants. Nous avons privilégié un niveau élevé de transparence, d'indépendance et de dialogue avec les parties intéressées tout en respectant le mandat clairement défini et les délais de l'Examen. De ce fait, de nombreuses personnes ont été appelées à exprimer leur point de vue et à apporter leur soutien au pied levé.

Je suis très reconnaissant envers tous ceux qui ont répondu à cet appel d'une manière aussi exemplaire.

Je tiens tout d'abord à remercier les membres de mon conseil consultatif : Sandra Pupatello, Jim Quick et Jacques Roy. Grâce à leur professionnalisme, à leur attitude positive et à leurs conseils judicieux, nos réunions, nos consultations et nos délibérations ont été à la fois productives et agréables. Le contenu de ce rapport reflète en grande partie leurs idées et leurs avis.

J'aimerais également remercier les nombreux représentants des industries aérospatiale et spatiale, des milieux académique et de la recherche, des syndicats et des gouvernements provinciaux qui ont présidé les groupes de travail ou y ont participé, ont pris part à des tables rondes, ont accueilli mes collègues et moi-même dans le cadre de visites sur le terrain, nous ont rencontrés dans le cadre de réunions bilatérales et ont présenté des mémoires. Je sais que pour chacun d'entre vous, ces activités s'ajoutaient à vos tâches quotidiennes, et je vous suis reconnaissant d'avoir accepté de mettre votre temps et vos compétences au service de l'Examen.

Il convient de mentionner tout spécialement l'Association des industries aérospatiales du Canada. Son conseil d'administration et son personnel ont joué un rôle de premier plan en renseignant les entreprises des industries aérospatiale et spatiale sur l'Examen et en participant à l'organisation des groupes de travail multipartites dirigés par les représentants de l'industrie, dont les discussions et les recommandations ont été si importantes pour l'Examen.

Je suis très reconnaissant envers les gens d'affaires, les chercheurs et les responsables gouvernementaux d'autres pays qui ont accepté de nous rencontrer, mes collègues et moi-même, lors de nos visites de collecte d'information à l'étranger, et de parler sans détour de leurs plans d'action et des défis auxquels ils font face.

Par ailleurs, l'Examen a grandement bénéficié de l'information et des idées communiquées par les fonctionnaires canadiens de nombreux ministères et organismes dans le cadre de séances d'information, de groupes de travail et de visites sur le terrain.

Enfin, je remercie le Secrétariat de l'Examen de l'aérospatiale, sous la gouverne de Scott Streiner. Le Secrétariat a fourni un soutien exceptionnel et des conseils judicieux pendant la période intense de 11 mois qui s'est écoulée entre les préparatifs initiaux en vue de l'Examen et la publication de ce rapport. La production d'un document de politique publique couvrant une si vaste gamme de questions et de points de vue tout en respectant les délais et le budget constitue un véritable exploit.

J'ai cité nombre de personnes dont les contributions ont rendu l'Examen possible, mais j'aimerais souligner, en terminant, que j'assume la pleine responsabilité des constatations et des recommandations formulées dans les deux volumes du rapport.

David Emerson

Note sur les sources de données

Les données dans le présent volume proviennent de multiples sources, notamment l'Agence spatiale canadienne, Statistique Canada, Industrie Canada, l'Association des industries aérospatiales du Canada et l'Organisation de coopération et de développement économiques, ainsi que des rapports de diverses entreprises spatiales et de sociétés d'experts-conseils comme Euroconsult.

Sauf indication contraire, les données présentées dans ce volume se rapportent exclusivement au secteur de l'espace tel que défini, tandis que les données dans le volume complémentaire se rapportent exclusivement au secteur de l'aérospatiale.

Sommaire

Le Canada exerce des activités dans l'espace depuis 50 ans, 5 ans après que l'humanité y a fait son entrée. Nous sommes le troisième pays à avoir eu en orbite un satellite construit sur son propre territoire, le premier à avoir eu son propre satellite de télécommunications national, le premier à avoir développé un satellite de diffusion directe et — comme le savent tous les Canadiens ayant vu la feuille d'érable sur le « biceps » du bras télémanipulateur, le « Canadarm » — nous sommes un pionnier en robotique spatiale.

L'espace devient plus essentiel que jamais pour les économies modernes et la sécurité nationale. La révolution numérique qui transforme les sociétés contemporaines — créant de nouveaux moyens de production des connaissances, offrant un accès mobile à des banques d'information et à des produits de divertissement ne connaissant plus les frontières, et établissant de nouvelles relations entre les pouvoirs publics et les populations — est en partie possible grâce aux applications et aux actifs spatiaux. Les satellites jouent un rôle de plus en plus important dans des domaines aussi variés que l'agriculture de précision, l'extraction des ressources, la météorologie et la climatologie, la surveillance environnementale, les services d'éducation et de santé, les interventions d'urgence, la surveillance des frontières, l'exploitation de drones militaires et civils et le déploiement rapide des forces armées. Ce ne sont plus seulement les gros satellites onéreux qui offrent ces possibilités : les petits satellites moins coûteux sont de plus en plus perfectionnés et offrent un plus large éventail d'options aux clients des secteurs public et privé qui achètent et utilisent des actifs spatiaux.

Pour toutes ces raisons, des dizaines de pays sont déterminés à s'associer avec des puissances spatiales bien établies pour mettre en orbite et exploiter des actifs spatiaux, alors qu'un nombre croissant d'investisseurs s'intéressent aux projets spatiaux commerciaux, depuis le lancement de satellites et les services de ravitaillement en orbite, jusqu'au tourisme spatial et à l'exploration minière dans l'espace.

Étant donné son vaste territoire, sa population dispersée, ses collectivités isolées, ses longs littoraux, ses abondantes ressources naturelles et son emplacement nordique, le Canada a particulièrement besoin d'applications et d'actifs spatiaux. Ainsi, la bonne combinaison de satellites et d'infrastructure terrestre connexe sera indispensable si le pays veut accélérer la création de richesses, protéger l'environnement et affirmer sa souveraineté alors que le Nord commence à s'ouvrir.

Par le passé, l'activité spatiale était dans une large mesure dirigée par l'État. Motivés en partie par le prestige, en partie par la curiosité et en partie par la volonté d'appuyer la prestation de services publics, les gouvernements ont assumé la plupart des coûts et des risques associés à l'exploration et à l'activité spatiales. Dans les pays dotés d'une économie de marché, les gouvernements ont établi des partenariats avec des entreprises qui ont obtenu des contrats pour concevoir et fabriquer des actifs spatiaux en vue d'une utilisation publique ou privée. Le Canada a ainsi mis sur pied une industrie spatiale de 3,4 milliards de dollars, qui emploie 8 000 travailleurs dans toutes les régions du pays et tire 80 % de ses revenus des télécommunications par satellite. De plus, elle réalise 50 % de ses ventes à l'étranger, ce qui en fait l'une des industries spatiales les plus axées sur les exportations au monde.

En raison de ses forces dans des créneaux comme les télécommunications par satellite, l'observation de la Terre et la robotique spatiale, et grâce à de solides réseaux mondiaux et à une réputation enviable, l'industrie canadienne est bien placée pour tirer parti des nouvelles possibilités, réussir commercialement et servir l'intérêt public.

Cependant, le maintien du statu quo ne sera pas suffisant. Pour servir l'intérêt national grâce à l'activité spatiale et favoriser la compétitivité de l'industrie spatiale canadienne, il faudra de la détermination, des priorités claires établies au plus haut niveau ainsi que des plans et des programmes efficaces qui concrétiseront ces priorités. Si les efforts du Canada dans l'espace ont été entravés au cours des 10 dernières années, c'est en partie parce que les objectifs n'étaient pas suffisamment clairs, que les liens hiérarchiques entre les organismes publics étaient flous et que les processus employés pour l'approvisionnement en actifs et services spatiaux n'étaient pas adaptés aux nouvelles réalités mondiales ni à la capacité commerciale des entreprises spatiales. Dans un secteur où les projets sont onéreux, complexes, de longue durée et tributaires de l'innovation, il est essentiel d'avoir des objectifs concrets, un financement prévisible et une mise en œuvre méthodique.

Nombre des recommandations formulées dans le volume complémentaire sur l'aérospatiale s'appliquent également au secteur spatial, depuis l'inclusion de l'aérospatiale et de l'espace comme priorités dans la Stratégie des sciences et de la technologie du gouvernement, jusqu'à l'examen des régimes de contrôle des exportations et de contrôle intérieur pour veiller à ce qu'ils ne soient pas trop restrictifs, en passant par les mesures visant à encourager les jeunes à étudier et à faire carrière dans les secteurs liés à l'aérospatiale et à l'espace.

Le présent volume porte sur les améliorations aux politiques et aux programmes propres au secteur spatial. Il recommande que :

  1. le gouvernement reconnaisse explicitement l'importance des technologies et de la capacité spatiales pour la sécurité nationale, la prospérité économique et la croissance durable, et que le ministre de l'Industrie présente chaque printemps des priorités gouvernementales annuelles, quinquennales et décennales pour le Programme spatial canadien au Comité du Cabinet chargé des priorités et de la planification, dirigé par le premier ministre, aux fins de discussion et d'approbation;
  2. le gouvernement établisse un conseil consultatif canadien dans le domaine spatial qui relèvera du ministre de l'Industrie et dont les membres seront issus de l'industrie, des milieux académique et de la recherche, des provinces et territoires ainsi que des ministères et organismes fédéraux;
  3. soit créé un conseil de gestion du programme spatial au niveau des sous-ministres afin de coordonner les activités spatiales fédérales, que soient mises en place des ententes propres aux projets pour assurer une gestion rigoureuse, et que tous les ministères et organismes participant au Programme spatial canadien soient obligés de rendre compte de la façon dont ils mettent en œuvre les priorités établies par le Cabinet;
  4. le financement de base de l'Agence spatiale canadienne soit stabilisé, en dollars réels, pour une période de 10 ans, qu'on ait recours à plusieurs sources au sein et à l'extérieur du gouvernement fédéral pour financer les grands projets et initiatives dans le domaine de l'espace, et qu'on continue d'accroître la collaboration internationale en vue de partager les coûts et les retombées de ces grands projets et initiatives;
  5. soit établie le plus tôt possible pendant la phase de définition des projets spatiaux une version définitive de la portée, des délais et des exigences en matière de rendement;
  6. les processus d'approvisionnement en actifs et services spatiaux soient de nature concurrentielle et que les propositions soient évaluées en fonction de leur prix, de leur respect des exigences définies et de leur valeur industrielle et technologique pour le secteur spatial canadien;
  7. le financement total alloué aux activités de développement technologique de l'Agence spatiale canadienne soit augmenté de 10 millions de dollars par an au cours des trois prochaines années, puis qu'il soit maintenu à ce niveau;
  8. lorsque les coûts sont modiques et qu'il n'existe aucun risque pour la sécurité publique, le gouvernement crée des conditions propices à l'expansion de l'activité commerciale dans le domaine spatial.

Même s'il y a plus d'un demi-siècle que l'espace s'avère important pour le Canada, ce secteur est loin de revêtir autant d'importance maintenant qu'il en aura au cours des 50 prochaines années. Autrement dit, il constituera un facteur crucial de l'identité nationale d'un pays qui aspire à assurer la prospérité et la sécurité à long terme de sa population, à protéger son environnement naturel et à s'acquitter de ses responsabilités internationales.

La question n'est pas de savoir si le Canada devrait exercer des activités dans l'espace, mais de déterminer comment les politiques et programmes publics peuvent donner l'assurance que sa présence dans l'espace et que les activités connexes au sol servent au mieux l'intérêt public et aident le secteur spatial à prospérer. Pour atteindre ces objectifs, le Canada doit se doter d'un programme spatial articulé autour de priorités mûrement réfléchies et explicites mises en œuvre au moyen d'une gouvernance rigoureuse, de solides plans de gestion, de pratiques d'approvisionnement modernes et d'une attention accrue au développement technologique et commercial. Des investissements supplémentaires dans l'infrastructure et les services spatiaux pourraient être requis à terme, mais toutes les recommandations énoncées plus haut peuvent être appliquées de manière neutre sur le plan financier. Il n'y a aucune raison pour attendre ou hésiter.

Partie 1
Mandat et processus de l'Examen

Les actifs spatiaux constituent une infrastructure stratégique essentielle au fonctionnement des économies et sociétés modernes. Ils sont à l'origine d'une révolution mondiale des communications, de nouveaux moyens de surveiller la surface et l'atmosphère terrestres, de la maîtrise et du contrôle des systèmes de transport et du matériel militaire, et d'une meilleure compréhension de notre place dans l'univers.

Les progrès dans l'espace sont caractérisés par l'omniprésence du gouvernement, en partie parce que l'espace est quasi indissociable de la sécurité nationale et de l'influence géopolitique. Cette omniprésence reflète également le fait que la partie se joue à long terme, qu'elle présente des risques importants et qu'elle requiert des « capitaux patients ».

Cette réalité change, à mesure que les technologies évoluent et que de plus en plus de sociétés privées tirent parti de possibilités liées à l'espace. Mais le changement graduel de l'équilibre public-privé dans l'espace ne heurte en rien une vérité indéniable : l'espace jouera un rôle de premier plan dans la défense de nos intérêts nationaux au cours des 50 prochaines années et au-delà. Si le Canada veut demeurer l'un des chefs de file mondiaux dans l'espace, le maintien du statu quo ne suffira pas. À l'heure actuelle, alors que des dizaines de pays se bousculent pour s'associer avec des puissances spatiales bien établies afin d'envoyer et d'exploiter des actifs loin de la surface de la Terre, le Canada doit prendre du recul pour définir clairement ce qu'il veut et doit faire dans l'espace au cours des prochaines décennies.

Structure de l'industrie spatiale

L'industrie spatiale comprend trois grands segments :

  • le segment spatial englobe la conception et la fabrication de matériel (p. ex. satellites et engins spatiaux) ainsi que son déploiement dans l'espace;
  • le segment terrestre comprend la conception, la construction et l'exploitation d'équipement et d'installations au sol utilisés pour faire fonctionner le matériel dans l'espace et recevoir ses transmissions de données;
  • le segment des applications et des services en aval utilise les données générées par l'équipement dans l'espace pour fournir plusieurs services, comme les données du système mondial de localisation et les images de cartographie.

L'intérêt mondial grandissant pour l'espace découle d'un calcul simple mais convaincant : la conception, la fabrication et le contrôle des satellites et la participation à l'exploration spatiale et aux missions scientifiques enrichissent les nations, les rendent plus sûres, plus intelligentes et mieux respectées. Ces activités stimulent l'imagination, suscitent la fierté, sauvent des vies et améliorent la qualité de vie de bien des façons, parfois invisibles.

La richesse naturelle du Canada que lui confèrent sa géographie, ses ressources et sa situation nordique lui donne de solides raisons de bien faire les choses quand il s'agit de l'espace. Notre prospérité économique, notre sécurité nationale et la gestion de notre environnement dépendent essentiellement de la façon dont nos priorités en matière d'espace sont définies et respectées alors que nous cherchons à obtenir des résultats concrets.

Dans ce contexte, le gouvernement a annoncé qu'il entreprendrait « un examen exhaustif de l'ensemble des politiques et des programmes fédéraux axés sur le secteur de l'aérospatiale pour élaborer un cadre stratégique fédéral visant à maximiser la compétitivité de ce secteur exportateur et les retombées qui en découlent pour les CanadiensNote 1 ».

L'Examen de l'aérospatiale a été annoncé officiellement le 27 février 2012. David Emerson, chef de l'Examen, a été épaulé par un conseil consultatif composé de Sandra Pupatello, de Jim Quick et de Jacques Roy.

Il a été déterminé d'emblée que l'Examen serait indépendant, fondé sur des données probantes et axé sur les tendances à long terme de l'industrie à l'échelle mondiale, qu'il serait ouvert aux approches et aux solutions novatrices mais pratiques, et qu'il viserait à fournir des recommandations concrètes et neutres sur le plan financier. Ce volume présente les constatations et les avis issus de l'Examen en ce qui concerne le secteur spatial. Le secteur de l'aérospatiale fait l'objet d'un volume complémentaire.

Pour les besoins de la recherche et de l'analyse, l'Examen repose sur quatre sources d'information et d'avis.

Premièrement, en étroite concertation avec l'Association des industries aérospatiales du Canada, l'équipe de l'Examen a mis sur pied des groupes de travail dirigés par des représentants de l'industrie dans les domaines suivants :

  • développement, démonstration et commercialisation de la technologie;
  • accès aux marchés et développement des marchés;
  • approvisionnement public lié à l'industrie aérospatiale;
  • petites entreprises et développement de la chaîne d'approvisionnementNote 2;
  • gens et compétences;
  • espace.

Les groupes de travail étaient composés de représentants de l'industrie, d'établissements d'enseignement supérieur et de recherche et de syndicats, ainsi que de fonctionnaires fédéraux agissant comme observateurs. Chaque groupe de travail a reçu un mandat précis accompagné d'une série de questions, et a tenu des discussions qui ont abouti à la préparation de rapports contenant des constatations et des avis à l'intention du chef de l'Examen. Les présidents et vice-présidents des groupes de travail n'étaient pas tenus d'obtenir un consensus, mais ont été encouragés à parvenir à l'accord le plus large possible entre les participants, et à veiller à ce que leurs conseils reposent sur des éléments probants et une analyse rigoureuse.

Deuxièmement, le chef de l'Examen et les membres du conseil consultatif ont tenu une série de tables rondes, de réunions et de visites au Canada et dans les principaux pays où l'industrie aérospatiale est présente. Les réunions tenues au pays visaient principalement à comprendre la situation de l'industrie canadienne et à cerner quels étaient, selon elle, les politiques et les programmes efficaces et ceux qui ne répondaient pas aux attentes. Les réunions à l'étranger avaient pour but d'en apprendre davantage sur les pratiques exemplaires d'autres pays dotés de secteurs de l'aérospatiale et de l'espace dynamiques, et d'évaluer les possibilités et les défis nouveaux sur le plan concurrentiel afin de renforcer la collaboration et d'accroître la réussite commerciale.

Voyageant principalement en groupe, le chef de l'Examen et les membres du conseil consultatif se sont rendus à Montréal, à Toronto, à Winnipeg, à Vancouver et à Halifax. Voyageant principalement seuls, ils se sont rendus aux États-Unis, au Royaume-Uni, en France, en Allemagne, en Chine, au Japon, en Russie et au Brésil.

Troisièmement, l'équipe de l'Examen a commandé à des spécialistes indépendants 16 études portant sur des sujets variés (voir l'appendice A), notamment l'incidence des tendances mondiales sur les industries spatiale et aérospatiale canadiennes, les régimes de contrôle des exportations au Canada et à l'étranger, une comparaison de la structure et des budgets des programmes spatiaux au Canada et dans d'autres pays de compétence spatiale, et le rôle éventuel des actifs spatiaux dans la promotion de la Stratégie pour le Nord du Canada.

Enfin, l'équipe de l'Examen a invité les parties intéressées à présenter un mémoire (voir l'appendice B) sur son site Web. Elle a reçu environ 25 documents d'un large éventail d'organisations, d'entreprises, de chercheurs académiques et de citoyens.

La plupart des documents et des analyses découlant de ces quatre sources d'information et d'avis peuvent être consultés sur le site Web de l'Examen. Espérons qu'ils demeureront pendant un certain temps une importante source d'information et d'idées pour ceux qui s'intéressent à la configuration et à l'avenir des secteurs de l'aérospatiale et de l'espace.

En utilisant les quatre sources, l'équipe de l'Examen s'est penchée sur la conjoncture actuelle et sur les tendances à long terme, et a analysé le rôle et le point de vue de tous les acteurs.

Son analyse a été guidée en partie par le principe selon lequel, dans une économie de marché, le sort de l'industrie est entre ses propres mains et qu'il faut soigneusement délimiter le rôle du gouvernement. Dans le secteur spatial, la validité de ce principe a été mise à l'épreuve, car depuis toujours, le gouvernement est le principal bailleur de fonds et consommateur d'applications et d'actifs spatiaux. Dorénavant, les restrictions budgétaires, les progrès technologiques et l'ingéniosité du secteur privé déboucheront inévitablement sur une gamme diversifiée et plus équilibrée d'activités et d'intervenants dans le domaine spatial.

Le rôle du gouvernement à l'appui de l'industrie canadienne se concentre dans quelques domaines clés :

  • Appuyer la recherche-développement (R-D) qui est susceptible de ne pas donner de résultats commercialisables avant plusieurs années, mais qui pourrait servir grandement l'intérêt public, en partie grâce au partage du risque.
  • Améliorer le fonctionnement des marchés et le rendement des entreprises en facilitant la communication entre les entreprises dont les besoins et les capacités peuvent être complémentaires — au Canada et à l'étranger — ainsi qu'entre l'industrie et les établissements d'enseignement supérieur et de recherche.
  • Prendre des décisions en matière d'approvisionnement qui renforcent les industries nationales et, par le fait même, l'économie du pays tout en respectant les règles commerciales internationales et en faisant l'acquisition du meilleur produit à un coût raisonnable.
  • Protéger la population — et l'industrie — en veillant à ce que les produits canadiens soient sûrs et à ce que les technologies stratégiques ne tombent pas entre les mains d'États ou d'intérêts hostiles.
  • Améliorer l'efficacité du marché du travail en appuyant des établissements d'enseignement supérieur dynamiques qui comprennent les besoins de l'industrie et en facilitant le recrutement de personnes compétentes de l'étranger dans les domaines où le pays est aux prises avec une grave pénurie de compétences.
  • Permettre aux entreprises canadiennes de rivaliser à armes égales avec leurs concurrents sur la scène mondiale en négociant des règles du jeu équitables, en veillant à ce que ces règles soient respectées dans la pratique et en communiquant aux entreprises de l'information sur les marchés étrangers.
  • Fournir du financement à l'appui de l'achat de produits canadiens, pourvu que les modalités de financement soient avantageuses pour les contribuables et pour l'économie, et qu'elles soient régies par des accords internationaux.

Même si le rôle du gouvernement doit être clairement délimité, le Canada reconnaît depuis longtemps que les investissements publics liés à l'espace sont essentiels s'il veut répondre aux impératifs fondamentaux de son identité nationale, notamment la surveillance des frontières et des côtes du pays, l'amélioration de sa réputation internationale, l'établissement de liens avec une petite population dispersée sur une énorme masse terrestre et la prestation de services à cette population, la stimulation de la croissance économique, la protection de l'environnement, la promotion du développement de nouvelles technologies et le recul des limites du savoir.

Ces impératifs deviendront plus pertinents que jamais au cours des décennies à venir — et mettront sévèrement à l'épreuve la « neutralité financière ». Même si le succès au cours des prochaines années ne requiert pas un grand apport de ressources publiques additionnelles, l'exploitation du plein potentiel du Canada nécessitera bientôt des investissements de taille dans l'infrastructure spatiale.

Pour l'instant, un objectif clairement défini et des plans d'action concrets, appuyés par un cadre de gouvernance et de gestion solide, des achats publics intelligents et une attention accordée au renforcement de la capacité technologique et commerciale, peuvent grandement contribuer à maintenir le Canada au rang de puissance spatiale mondiale.


Notes en bas de page

  1. 1Gouvernement du Canada, Budget de 2011  : La prochaine phase du Plan d'action économique du Canada, Ottawa, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 2011. (Retour à la référence de la note en bas de page 1)
  2. 2Ce groupe de travail a présenté deux rapports distincts, soit un sur les petites entreprises et un sur le développement de la chaîne d'approvisionnement. (Retour à la référence de la note en bas de page 2)

Partie 2
Contexte

Chapitre 2.1
Pourquoi l'espace?

Dans l'imaginaire populaire, l'« espace » est généralement associé aux réalisations historiques audacieuses et aux percées technologiques, depuis le succès soviétique de Spoutnik en 1957 jusqu'au premier pas de Neil Armstrong sur la Lune, depuis la construction de la Station spatiale internationale jusqu'à l'analyse de la surface de Mars par le rover Curiosity, et depuis le Canadarm à l'œuvre jusqu'aux photos saisissantes de galaxies éloignées saisies par le télescope Hubble. L'espace est effectivement un théâtre d'exploration et de découverte, mais sur le plan strictement pratique, il s'agit simplement d'un endroit comme l'air, la terre et la mer où nous installons de l'équipement pour fournir des services qui ne pourraient pas être offerts efficacement par d'autres moyens.

Figure 1 : Altitude habituelle des actifs spatiaux et des aéronefs

Figure 1 : Altitude habituelle des actifs spatiaux et des aéronefs

Description de la figure

Ce diagramme montre l'altitude habituelle de différents types d'actifs spatiaux et d'avions. Par rapport au mont Everest, qui culmine à près de 9 000 m, les avions à réaction commerciaux volent généralement à une altitude un peu plus élevée, soit 10 000 m, tandis que les chasseurs supersoniques volent à une altitude d'environ 18 000 m. Quant à la Station spatiale internationale, elle fait le tour de la Terre à une altitude moyenne d'environ 370 kilomètres, tandis que d'autres vaisseaux spatiaux habités volent à environ 400 kilomètres d'altitude. Les satellites d'observation de la Terre sont en orbite à une altitude moyenne de 800 kilomètres comparativement à 14 000 kilomètres pour les satellites de positionnement (comme ceux utilisés pour les systèmes de positionnement mondial). La plupart des satellites météo et de télécommunications se trouvent à environ 35 000 kilomètres d'altitude.

On considère généralement que l'espace commence à une centaine de kilomètres au-dessus de la surface de la planète. En comparaison, un aéronef commercial vole rarement à plus de 12 kilomètres d'altitude.

Les activités de l'être humain dans l'espace entrent dans trois catégories.

La première, c'est la prestation de services publics à l'aide de satellites et des stations terrestres connexes, qui sont généralement achetés par les gouvernements, mais peuvent être en grande partie conçus, fabriqués et exploités par des entreprises privées. Les pays modernes ne peuvent plus se passer des satellites. Même s'ils peuvent coûter des dizaines ou des centaines de millions de dollars chacun, les satellites constituent le moyen le moins cher — et parfois l'unique moyen — de fournir une large gamme sans cesse croissante de services. Leurs nombreuses applications nous permettent notamment :

  • d'observer la météo et d'établir des prévisions météorologiques;
  • de trouver des ressources naturelles et de surveiller leur mode d'extraction et d'exploitation;
  • de surveiller les répercussions des changements climatiques;
  • d'accroître les rendements agricoles;
  • d'intervenir rapidement en cas de catastrophes naturelles et d'autres urgences;
  • de communiquer avec les collectivités isolées et de leur fournir des services en matière de santé et d'éducation;
  • de repérer les tentatives hostiles visant à traverser nos frontières ou à aborder nos côtes;
  • d'exploiter des drones et d'appuyer des déploiements militaires dans le monde entier.

Utilisation de l'imagerie satellitaire pour les secours en cas de catastrophe

Photo satellite de Haïti
La première image couvrant les principaux secteurs touchés de Port-au-Prince, le 14 janvier 2010.
Source : Satnews Daily, « MacDonald, Dettwiler and Associates — RADARSAT-2's contribution to Haitian imagery », le 21 janvier 2010.

Le satellite canadien RADARSAT-2 peut capter des images même dans l'obscurité ou dans de mauvaises conditions atmosphériques, ce qui est particulièrement utile en cas de tremblements de terre, d'inondations, de glissements de terrains ou d'autres catastrophes naturelles. Les images prises avant et après une catastrophe naturelle peuvent être comparées afin de déterminer les régions les plus durement touchées et de trouver des itinéraires praticables pour les travailleurs humanitaires et des endroits sûrs pour les installations médicales et les abris.

Après le tremblement de terre qui a frappé Haïti le 12 janvier 2010, l'imagerie provenant de RADARSAT-2 a servi à évaluer l'ampleur des dommages et à orienter l'aide humanitaire. Le Canada a fourni l'imagerie en vertu de la Charte internationale « Espace et catastrophes majeures », un programme international qui utilise les données spatiales à l'appui des efforts de rétablissement et de reconstruction à la suite d'une catastrophe.

Applications satellitaires

Le Centre canadien de télédétection (CCT), de concert avec des organismes de réglementation provinciaux et fédéraux et l'Agence spatiale canadienne, élabore une nouvelle technologie qui utilise l'imagerie de RADARSAT-2 pour surveiller la déformation géomorphologique causée par l'exploitation souterraine des sables bitumineux du Canada, activité qui risque de mettre en danger les travailleurs et d'endommager les installations en service. Cette technologie permettra aux sociétés d'exploitation des sables bitumineux de relever les endroits qui posent problème et de prendre des mesures visant à prévenir les accidents.

Le CCT élabore également un système automatisé pour surveiller les répercussions environnementales de la mise en place de l'infrastructure liée aux sables bitumineux grâce à l'acquisition d'images haute résolution et multicapteurs prises par satellite. Cette technologie permettra de mieux évaluer les répercussions sur l'environnement et, dès lors, de garantir que les règlements visant à limiter les effets néfastes sont bien conçus.

Plus au nord, le Service canadien des glaces d'Environnement Canada analyse plus de 7 000 images RADARSAT-1 par an pour s'assurer que la navigation dans les eaux couvertes de glace est sûre, efficace et durable. L'utilisation de l'imagerie satellitaire a permis de réaliser des économies annuelles d'environ 7,7 millions de dollars au cours des cinq premières années, grâce à la suppression des vastes opérations de reconnaissance par aéronef. Les conditions météorologiques n'influent pas sur la surveillance effectuée grâce à RADARSAT-1, qui fournit des observations sur une plus grande région géographique que celle que pourrait couvrir un aéronef. RADARSAT-2, satellite plus récent, permet de discerner encore mieux les caractéristiques de la glace.

La deuxième catégorie concerne l'utilisation de satellites et de stations terrestres afin de fournir des services pour lesquels il existe un marché commercial, comme les télécommunications, l'information et les loisirs, et de recueillir des données brutes qui sont ensuite traitées dans des applications populaires comme Google Earth et le système mondial de localisation (GPS). En ce qui concerne cette activité commerciale, le rôle des gouvernements se limite principalement à la surveillance réglementaire et à l'obtention de positions orbitales pour les satellites d'entreprises privées.

La troisième catégorie d'activité spatiale concerne l'exploration et les sciences spatiales, qui visent principalement à satisfaire notre soif et besoin de connaissances fondamentales. Les exploits héroïques d'astronautes, les missions vers la Lune et d'autres planètes, les laboratoires spatiaux et les télescopes pour l'observation de l'espace lointain nous permettent de mieux comprendre l'univers et la place que nous y occupons. Ils constituent une source de fierté nationale et de prestige, en plus de générer des retombées technologiques et économiques. Ces activités sont presque toujours financées par le gouvernement et, compte tenu de leur envergure et de leur complexité, elles sont généralement menées à bien dans le cadre d'une collaboration internationale.

Utilisation des technologies spatiales sur Terre

L'investissement du Canada dans les technologies spatiales, comme le Canadarm, a engendré des progrès technologiques dans d'autres secteurs, notamment la santé et l'exploitation minière.

Le neuroArm, dont la technologie dérive directement des technologies du Canadarm, a révolutionné la neurochirurgie et d'autres branches de la médecine opératoire en les affranchissant de l'intervention humaine et des contraintes de la salle d'opération. Le neuroArm a été élaboré dans le cadre d'un partenariat entre l'Université de Calgary, le Conseil national de recherches du Canada et MacDonald, Dettwiler and Associates (MDA). Une cinquantaine de neurochirurgies ont été effectuées avec succès grâce à cette technologie depuis 2008, et l'on travaille à l'élaboration d'une version commerciale destinée aux marchés étrangers. Des technologies similaires sont en cours de développement pour la détection et le traitement du cancer du sein ainsi que les soins pédiatriques.

Photo de véhicules robotiques de Penquin Automated Systems
Sources : MDA; Penguin Automated Systems; Sudbury Mining Solutions Journal, « Penguin ASI robots assess Montcalm instability », le 1er décembre 2010; Northern Ontario Business, « Sudbury-born mine tech assists in Elliot Lake mall excavation », le 17 juillet 2012.

En utilisant les technologies spatiales, les travailleurs de l'industrie minière peuvent maintenant télécommander de l'équipement lourd en surface et sous terre et utiliser la robotique pour préparer les mines en vue du forage ou de l'abattage à l'explosif dans les zones dangereuses où les roches sont instables. Penguin Automated Systems de Sudbury, par exemple, a élaboré des véhicules robotiques pour procéder au levé de la mine Montcalm de Xstrata Nickel, qui a été fermée en mars 2009 après un énorme effondrement du sol. Équipés de bras robotiques dérivés des technologies du Canadarm, ces véhicules ont permis à Xstrata d'inspecter la mine et de déterminer si les opérations pouvaient reprendre en toute sécurité. En outre, des robots miniers développés par Penguin ont facilité les travaux d'excavation après l'effondrement du centre commercial d'Elliot Lake, en Ontario, en juin 2012.

« À l'heure actuelle, on ne se rend plus compte de l'importance des applications et services spatiaux. Mais presque tous les aspects de la vie moderne au Canada dépendent de l'espace — depuis l'impression de notre journal du matin jusqu'aux transactions à la station-service, depuis les émissions de télévision et les appareils mobiles de poche jusqu'aux rouages de notre système financier et au réseau d'électricité. L'espace est un véritable moteur de l'économie nationale, à un point tel que nous oublions souvent sa contribution fondamentale à notre infrastructure nationale. On estime que les applications spatiales touchent la vie de chaque Canadien de 20 à 30 fois par jour, tous les jours. »
Rapport final du Groupe de travail sur l'espace, septembre 2012.

L'importance de l'espace ne fera qu'augmenter à mesure que les progrès technologiques accroîtront le nombre d'applications spatiales et réduiront les coûts. Les activités spatiales sont devenues essentielles pour développer des économies fortes, tisser la trame de la société et protéger la sécurité et la souveraineté nationales. C'est pour cette raison que de nombreux pays cherchent à se tailler une place dans l'espace. Le Canada a été un pionnier dans ce domaine; il s'est rapidement rendu compte du potentiel et de la valeur de l'espace pour son intérêt national.

Partie 2
Contexte (suite)

Chapitre 2.2
Le Canada dans l'espace

La conquête de l'espace a débuté il y a 55 ans, quand Spoutnik a fait son premier tour de la Terre. Le Canada a fait son entrée dans l'ère spatiale il y a 50 ans. Avec le lancement du satellite Alouette-I le 29 septembre 1962, le Canada est devenu la troisième nation à avoir mis en orbite un satellite fabriqué au pays. Alors que les États-Unis et l'Union soviétique se sont livrés à une course à l'espace alimentée par une rivalité géopolitique, le Canada a fait preuve de perspicacité, motivé par l'idée que les satellites pourraient jouer un rôle crucial en développant un pays vaste, peu densément peuplé, et en reliant ses habitants.

Cette idée est plus pertinente que jamais.

Alouette-I
Photo d'Alouette-I
Lancé le 29 septembre 1962, le satellite scientifique Alouette-I a marqué l'entrée du Canada dans l'ère spatiale.
Source : Agence spatiale canadienne.

Quand Alouette-I a été placé en orbite, le premier ministre John Diefenbaker a loué les réalisations scientifiques des ingénieurs et des travailleurs qui avaient conçu et construit le satellite; il a souligné les fins pacifiques et pratiques auxquelles servirait Alouette, ainsi que la collaboration transfrontalière avec les États-Unis — lesquels ont offert des services de lancement pour le satellite canadien — qui a contribué à la réussite du projet. Ces éléments – progrès scientifiques, applications pratiques et collaboration internationale — sont demeurés le fondement du Programme spatial canadien.

Alouette-I a été conçu pour recueillir de l'information et effectuer des recherches en vue d'améliorer les télécommunications entre le nord et le sud du Canada. Alouette-II lui a succédé en 1965, suivi par ISIS I en 1969 et ISIS II en 1971. Ces satellites ont ouvert la voie au lancement d'Anik A1 en 1972, le Canada devenant alors le premier pays à disposer d'un système national de télécommunications par satellite, et d'Hermes en 1976. Hermes était à l'époque le satellite de télécommunications le plus puissant, et le premier à diffuser des signaux de télévision directement aux maisons équipées de petites antennes, à permettre la prestation de services médicaux d'urgence dans les régions éloignées grâce à la télémédecine et à faciliter la téléconférence. L'incidence d'Hermes sur les télécommunications dans le Nord canadien a été particulièrement importante, puisque ce satellite a donné à ses résidents le même accès au téléphone et à la télévision que ceux dont jouissaient les citoyens dans le reste du pays.

Outre les télécommunications, c'est sur l'observation de la Terre que le Canada a rapidement concentré ses efforts dans le domaine spatial. Il a tout d'abord fourni une station terrestre de réception et de traitement pour les premières versions des satellites américains Landsat, ce qui a fait de l'industrie canadienne un chef de file dans le traitement des données recueillies par satellite et le développement d'applications. Plus tard, le Canada a mis au point une technologie d'observation de la Terre par radar adaptée à ses propres besoins, soit l'observation et la surveillance de vastes territoires et voies navigables chargées de glace pendant les longs hivers sombres et nuageux du Nord, ce qui a débouché sur le lancement de RADARSAT-1 en 1995 et de RADARSAT-2 en 2007. Ces satellites-radars sont parmi les plus sophistiqués au monde et fournissent des images détaillées de la surface terrestre de jour comme de nuit, peu importe les conditions météorologiques.

Photo de Flora MacDonald et d'un représentant de la NASA avec un prix Emmy
Le gouvernement du Canada et la National Aeronautics and Space Administration (NASA) ont remporté ensemble un prix Emmy en 1987 pour leur rôle dans le développement de la technologie satellitaire en bande Ku, dans le cadre du programme Hermes. Flora MacDonald, la ministre des Communications de l'époque, a accepté le prix en affirmant que le satellite Hermes était l'un des jalons les plus importants de l'histoire spatiale du Canada.
Source : Centre de recherches sur les communications Canada.

La collaboration du Canada avec les États-Unis dans le cadre de projets spatiaux s'est intensifiée au fil des ans. Dans les années 1960, l'entreprise canadienne Héroux Inc. a produit le train d'atterrissage des modules lunaires du programme Apollo. Dans les années 1970, le Conseil national de recherches du Canada (CNRC), en partenariat avec Spar Aérospatiale (achetée par la suite par MacDonald, Dettwiler and Associates), a conçu et fabriqué l'emblématique Canadarm, bras télémanipulateur qui, par la suite, a équipé toutes les navettes spatiales américaines et a ouvert la voie aux contributions robotiques du Canada à la Station spatiale internationale : le Canadarm2 en 2001 et le télémanipulateur d'entretien Dextre en 2008.

Pour ce qui est des sciences et de la recherche, le Canada a lancé les petits satellites SCISAT et MOST en 2003, le premier pour surveiller l'amincissement de la couche d'ozone et le second, pour réaliser des observations astronomiques. Des entreprises canadiennes, en particulier COM DEV, ont également fourni l'instrumentation scientifique pour des satellites américains, japonais, suédois et européens.

Contribution du Canada à la Station spatiale internationale

Tout comme les États-Unis, la Russie, l'Europe et le Japon, le Canada est un partenaire de la Station spatiale internationale (SSI), laboratoire de recherche orbital exceptionnel. L'investissement du Canada dans la SSI permet aux chercheurs canadiens d'avoir accès à la Station pour effectuer des recherches au profit des Canadiens.

Depuis le lancement de son premier module en 1998, la SSI fait le tour de la Terre 16 fois par jour à environ 370 km d'altitude et à une vitesse de 28 000 km/h. Elle parcourt quotidiennement une distance correspondant à un aller-retour entre la Terre et la Lune. La SSI a la taille d'un terrain de football et une surface habitable équivalente à celle d'une maison de cinq chambres.

Le Système d'entretien mobile (SEM) — un système robotique de pointe qui a permis d'effectuer l'assemblage de la SSI dans l'espace, un module à la fois — constitue un élément essentiel de la contribution du Canada à la SSI. Élaboré pour l'Agence spatiale canadienne par MacDonald, Dettwiler and Associates à Brampton, en Ontario, le SEM comprend les éléments suivants :

  • le Canadarm2, bras robotique de 17 mètres de longueur, qui a joué un rôle crucial dans l'assemblage et l'entretien de la SSI;
  • Dextre, le robot bricoleur à deux bras de la Station, que les astronautes et cosmonautes peuvent utiliser pour manipuler des objets délicats et enlever ou remplacer des pièces de la SSI;
  • la Base mobile, plateforme mobile et poste d'entreposage.
La Station spatiale internationale
Photo de la Station spatiale internationale
Source : Agence spatiale canadienne.

Enfin, le Canada a envoyé des astronautes dans l'espace plus souvent que tout autre pays, à l'exception des États-Unis et de la Russie, en partie grâce à son importante contribution au programme de la navette spatiale et à la Station spatiale internationale. L'astronaute Chris Hadfield, premier Canadien à avoir fait une sortie dans l'espace, deviendra aussi à la fin de 2012 le premier commandant canadien de la Station spatiale internationale.

Le programme spatial public du Canada a toujours fait appel au savoir-faire et à la collaboration de l'industrie. Les premiers satellites ont été financés et conçus par des ministères fédéraux, mais assemblés essentiellement par des entreprises privées. Les premiers satellites de télécommunications ont été exploités dans le cadre d'un partenariat public-privé, Télésat Canada, qui a été entièrement privatisé en 1993 et est depuis devenu un chef de file mondial dans la prestation de services de télécommunications par satellite. Le secteur privé a dirigé le développement d'applications de données recueillies par satellite et des processus connexes pour répondre aux besoins de levé et de cartographie du gouvernement. Il a aussi dirigé le développement ultérieur de satellites-radars. C'est bien sûr le gouvernement qui a prévu et financé les systèmes robotiques fournis par le Canada pour la navette spatiale et la Station spatiale internationale, mais leur conception et leur fabrication a été assurée par l'industrie.

Importance symbolique de l'espace pour les Canadiens

Photo d'un timbre avec le Canadarm et photo d'une pièce de monnaie avec le Canadarm et Chris Hadfield

Selon un reportage du réseau CBC en juin 2008, portant sur un sondage Ipsos-Reid, le Canadarm est considéré comme la plus grande réalisation canadienne de tous les temps, l'emportant sur les soins de santé universels, l'insuline et le téléphone.

En 2013, le Canadarm2 et Dextre figureront sur les billets de cinq dollars, tout comme d'autres thèmes emblématiques de l'identité nationale et des exploits du Canada, par exemple l'innovation en médecine et le chemin de fer qui relie l'est et l'ouest du pays.

En janvier 2011, Postes Canada a émis une série de cinq timbres soulignant la fierté canadienne, dont un illustre le Canadarm.

En avril 2006, la Monnaie royale canadienne a émis une pièce commémorative illustrant le Canadarm et le colonel Chris Hadfield, astronaute canadien.

Canadarm2 et Dextre
Photo du Canadarm2 et de Dextre
Le Canadarm2 (à gauche) et Dextre (à droite), le robot bricoleur canadien, le 26 décembre 2010.
Source : National Aeronautics and Space Administration (NASA).

Le Programme spatial canadien a ensuite été le principal catalyseur de la création d'une industrie spatiale canadienne de 3,4 milliards de dollars qui emploie aujourd'hui quelque 8 000 travailleurs aux quatre coins du pays. Quatre-vingts pour cent des recettes de l'industrie proviennent des services de télécommunications par satellite, et la moitié viennent des ventes à l'étranger (principalement aux États-Unis et en Europe), ce qui fait du secteur spatial canadien l'une des industries spatiales les plus axées sur les exportations au monde.

Figure 2 : Revenus du secteur spatial canadien par sous-secteur, 2010

Figure 2 : Revenus du secteur spatial canadien par sous-secteur, 2010
Description de la figure

Ce diagramme à secteurs présente la répartition des revenus totaux du secteur spatial canadien entre les sous-secteurs en 2010. Le sous-secteur des télécommunications par satellite détient la plus grande part puisqu'il a généré 79 % des revenus du secteur au Canada en 2010. Il était suivi des sous-secteurs de la navigation (8 %), de l'observation de la Terre (7 %), de la robotique (3 %) et des sciences spatiales (2 %). Les autres sous-secteurs sont à l'origine du pour cent restant des revenus du secteur spatial.

Source : Agence spatiale canadienne, État du secteur spatial canadien 2010.
  • Les télécommunications par satellite incluent les services de télécommunications de la voix et des données, de radiodiffusion et de télévision.
  • Les systèmes mondiaux de navigation par satellite offrent de l'information sur la position, le temps et la navigation aux utilisateurs équipés de récepteurs adéquats.
  • Les satellites d'observation de la Terre sont utilisés pour surveiller et protéger l'environnement, gérer les ressources naturelles et assurer la sécurité.
  • Le matériel de robotique spatiale est utilisé à l'appui des vols habités et non habités dans l'espace, comme l'exploration du terrain ainsi que la récupération, l'inspection et la réparation de satellites.
  • Les entreprises et chercheurs canadiens ont participé à plusieurs missions satellitaires visant des objectifs en sciences spatiales relatifs à la météorologie de l'espace, à l'astronomie et aux sciences environnementales, en vue d'améliorer les capacités technologiques du Canada dans le domaine spatial.

Texte adapté de Hickling Arthurs Low, The State of the Canadian Space Sector, rapport de recherche commandé dans le cadre de l'Examen de l'aérospatiale, août 2012.

Figure 3 : Revenus du secteur spatial canadien, de 2001 à 2010

Figure 3 : Revenus du secteur spatial canadien, de 2001 à 2010
Description de la figure

Ce graphe à barres empilées présente le total des revenus d'exportation et des revenus intérieurs du secteur spatial canadien de 2001 à 2010. À l'exception de reculs relativement modestes en 2002 et en 2007, les revenus totaux de l'industrie ont augmenté de façon constante au cours de la période, passant de 1,9 milliard de dollars en 2001 à 3,4 milliards de dollars en 2010. Les revenus intérieurs ont progressé, passant de 1,1 milliard de dollars en 2001 à 1,7 milliard en 2010, tandis que les revenus d'exportation ont plus que doublé, passant de 0,8 milliard de dollars à 1,7 milliard au cours de la même période.

Source : Agence spatiale canadienne, État du secteur spatial canadien 2010.

L'industrie spatiale canadienne est fortement concentrée, avec les 10 plus grandes entreprises générant près de 90 % de l'ensemble des revenus, relativement peu d'entreprises de taille moyenne et quelque 200 organisations de plus petite taille. L'un des points forts de l'industrie a été sa capacité d'établir des créneaux pour son leadership technologique mondial, souvent en exploitant des innovations mises au point dans le cadre de programmes gouvernementaux.

Le Programme spatial canadien est dirigé par l'Agence spatiale canadienne (ASC), établie en 1989 et investie du mandat prescrit par la loi « de promouvoir l'exploitation et l'usage pacifiques de l'espace, de faire progresser la connaissance de l'espace au moyen de la science et de faire en sorte que les Canadiens tirent profit des sciences et techniques spatiales sur les plans tant social qu'économique »Note 3. Le budget annuel de l'ASC en 2011-2012 s'élevait à 425 millions de dollars, dont environ un tiers était des fonds temporaires se rapportant au Plan d'action économique du Canada et à des projets particuliers.

À l'échelle fédérale, le ministère de la Défense nationale, le ministère de l'Environnement, le ministère des Ressources naturelles, le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, le ministère des Pêches et des Océans et le ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord canadien sont les principaux utilisateurs de l'espace. Le gouvernement finance également deux établissements de recherche publics, soit le CNRC et Recherche et développement pour la défense Canada, dont le mandat inclut des activités se rapportant à l'espace.

Enfin, plusieurs institutions académiques participent à la recherche et à l'éducation dans le domaine spatial. Elles veillent à ce que le Canada soit en mesure de former les cerveaux qui imagineront, concevront et fabriqueront les technologies de pointe requises pour répondre aux besoins spatiaux futurs du pays.

Cet éventail d'établissements et d'entreprises est à la fois la cause et l'effet des 50 années de succès du Canada dans l'espace et confère au pays une solide assise pour raffermir et renforcer sa position à une époque où les actifs spatiaux sont de plus en plus importants pour notre prospérité et notre sécurité à long terme. Toutefois, alors que le nombre de puissances spatiales augmente rapidement et que la concurrence est plus féroce que jamais, les politiques et programmes canadiens liés à l'espace semblent manquer de précision, d'orientation ainsi que de rigueur sur le plan de la gestion.


Notes

Partie 2
Contexte (suite)

Chapitre 2.3
Tendances mondiales

L'industrie spatiale, comme celle de l'aérospatiale, est profondément influencée par les changements suivants dans la conjoncture mondiale :

  • Rééquilibrage mondial : Nous observons une augmentation rapide de la puissance économique et géopolitique de régions et de pays différents de ceux qui ont dominé au cours de la deuxième moitié du 20e siècle. La Chine, la Russie, le Brésil, l'Inde et d'autres puissances montantes en Asie, au Moyen-Orient, en Amérique latine et en Afrique emboîtent le pas à l'Amérique du Nord, à l'Europe et au Japon. Nombre de ces pays sont populeux, vastes, ambitieux sur le plan géopolitique et disposés à tirer parti des pouvoirs et des ressources de l'État pour mettre sur pied des secteurs considérés comme ayant une importance stratégique.

Figure 4 : Part du PIB mondial, de 2000 à 2020

Figure 4 : Part du PIB mondial, de 2000 à 2020

Description de la figure

Ce graphique linéaire simple présente l'évolution prévue de la part du produit intérieur brut (PIB) mondial entre 2000 et 2020 pour les États-Unis, l'Union européenne, la Chine, l'Inde, le Brésil et le Canada. La part de l'économie chinoise a augmenté rapidement, passant de moins de 4 % du PIB mondial en 2000 à environ 10 % en 2011 et elle devrait atteindre près de 20 % en 2020. Pendant cette période, les parts des États-Unis et de l'Union européenne devraient baisser de manière constante. La part des États-Unis a atteint un sommet (32 %) en 2011 et devrait chuter à moins de 17 % d'ici 2020. De même, la part de l'Union européenne a atteint un sommet (31 %) en 2004 et devrait diminuer pour s'établir à moins de 21 % d'ici 2020. La taille de l'économie chinoise devrait dépasser celle des État-Unis d'ici 2018 et presque atteindre celle de l'Union européenne d'ici 2020. Les parts du PIB mondial de l'Inde et du Brésil augmentent également, mais beaucoup moins rapidement. D'ici 2020, la part de l'Inde dans le PIB mondial devrait s'établir à près de 6 %, comparativement à près de 4 % pour le Brésil. La part du Canada diminue légèrement et devrait chuter à moins de 2 % d'ici 2020.

Source : IHS Global Insight.
PIB = produit intérieur brut
  • Besoin en ressources naturelles et en production agricole : Alors que des centaines de millions de personnes passent d'un mode de subsistance rural à un mode de vie plus urbain de type classe moyenne, la demande de carburant, de matières premières à partir desquelles les produits de consommation sont fabriqués, d'eau et de nourriture augmente fortement.
Figure 5 : Consommation mondiale d'énergie, de 1990 à 2035
Figure 5 : Consommation mondiale d'énergie, de 1990 à 2035

Description de la figure

Ce graphe à barres empilées montre la croissance prévue de la consommation mondiale d'énergie jusqu'en 2035. En 1990, les pays membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont consommé environ 200 quadrillions de BTU d'énergie, comparativement à environ 155 quadrillions BTU pour le reste du monde. En 2008, la consommation du reste du monde avait dépassé celle des pays membres de l'OCDE (260 quadrillions de BTU par rapport à 244 quadrillions). En 2035, la consommation des pays membres de l'OCDE ne devrait avoir progressé que légèrement, pour s'établir à 288 quadrillions de BTU, tandis que la consommation dans le reste du monde aura presque doublé par rapport aux niveaux de 2008, pour atteindre 482 quadrillions de BTU.

Source : Energy Information Administration des États-Unis.
OCDE = Organisation de coopération et de développement économiques
  • Changements climatiques et préoccupations environnementales : Alors que l'on ressent les effets quotidiens des changements climatiques et que l'on perçoit mieux les impacts environnementaux possibles liés au développement économique et à l'extraction des ressources, les citoyens et les dirigeants politiques cherchent des moyens efficaces de surveiller ces développements et d'y répondre.

Diminution des glaces marines dans l'Arctique, 1979 et 2011

Étendue des glaces
Septembre 1979 (7,2 millions de km2)
Photo de l'étendue des glaces en septembre 1979
Septembre 2011 (4,6 millions de km2)
Photo de l'étendue des glaces en septembre 2011
Source : Adapté d'une image de Matt Savoie, National Snow and Ice Data Center, Université du Colorado, Boulder, à l'aide des données SSM/I superposées à l'image de la Bille bleue de la NASA.
  • Réduction des dépenses de défense et nouvelles menaces non conventionnelles à la sécurité. Dans un climat de restrictions financières, les pays occidentaux réduisent leur budget de défense, tandis que les responsables de la planification de la sécurité nationale concentrent de plus en plus leurs efforts sur la gestion des menaces non conventionnelles en plus des risques inhérents à la guerre traditionnelle.
  • Révolution numérique. Nous sommes au cœur d'une véritable révolution des communications déclenchée par l'augmentation exponentielle de la puissance informatique, l'avènement de la technologie sans fil et une explosion des médias sociaux. Les effets économiques, sociaux et politiques sont déjà profonds — et ce n'est qu'un début.
  • Vieillissement de la population. Les changements démographiques créent de nouveaux défis — et nécessitent de nouvelles stratégies — pour les entreprises qui doivent compter sur un effectif très instruit et hautement qualifié.

Ces tendances générales sous-tendent et continueront de façonner l'évolution de l'industrie spatiale mondiale. La plus importante est peut-être l'utilisation accrue de l'espace à des fins civiles. Par suite des percées technologiques — en particulier de la précision accrue de l'observation par satellite — et de l'augmentation de la demande de ressources naturelles, d'aliments, d'eau, de surveillance environnementale et de télécommunications à large bande émanant des pays développés et émergents, l'économie de l'espace civil continue de croître. Les satellites et les applications spatiales sont devenus indispensables aux gouvernements et aux entreprises privées pour satisfaire cette demande.

Figure 6 : Revenus de l'industrie des satellites à l'échelle mondiale, de 2001 à 2011
Figure 6 : Revenus de l'industrie des satellites à l'échelle mondiale, de 2001 à 2011

Description de la figure

Ce diagramme à colonnes présente les revenus annuels de l'industrie des satellites à l'échelle mondiale de 2001 à 2011. Les revenus à l'échelle mondiale ont progressé, passant d'environ 64 milliards de dollars américains en 2001 à 177 milliards en 2011.

Source : Satellite Industry Association.

« L'industrie mondiale des satellites a connu une croissance de 175 % de 2001 à 2011, soit une moyenne de 10,7 % par année. » [traduction]

Satellite Industry Association, State of the Satellite Industry Report: September 2012.

Un ensemble similaire de facteurs contribue à l'utilisation accrue de l'espace à des fins militaires. Les satellites sont maintenant une pièce cruciale de l'arsenal des forces armées modernes, en particulier face aux menaces non conventionnelles émanant de petits groupes de militants qui opèrent dans l'ombre. Par exemple, les satellites sont utilisés pour recueillir des renseignements par l'observation terrestre haute résolution et la surveillance des signaux, surveiller les frontières et les eaux souveraines, guider des drones au-dessus des territoires hostiles et appuyer les déploiements militaires en régions éloignées.

[traduction] « Les satellites de surveillance sont utilisés quotidiennement pour les besoins de la planification et du renseignement militaires. L'opération militaire ciblant Oussama ben Laden en 2011 constitue un excellent exemple de la façon dont ces actifs spatiaux sont utilisés. Après que la Central Intelligence Agency et l'armée américaine eurent déterminé l'emplacement possible du complexe où résidait Oussama ben Laden à Abbottabad, au Pakistan, elles ont utilisé l'imagerie satellitaire pour créer une carte détaillée de l'emplacement. La carte a probablement été élaborée à l'aide d'actifs appartenant à la National Geospatial-Intelligence Agency, bien que des satellites militaires et commerciaux aient peut-être également fourni les données pertinentes pour la cartographie. Cette information incluait non seulement des images du spectre visible, comme celles qu'on voit habituellement sur Google Earth, mais aussi des images dans diverses longueurs d'onde. L'utilisation de l'imagerie satellitaire de la cible au fil du temps peut montrer le développement du site. Dans le cas du complexe de ben Laden, les images montrent que le terrain était vacant en 2001, qu'il y avait un bâtiment neuf en 2005 et que le complexe avait été élargi en 2011. Quand l'opération a été réalisée, les télécommunications par satellite sécurisées ont été essentielles pour mettre les combattants sur le terrain en contact avec les experts dirigeant l'opération. »

Space Foundation, The Space Report: The Authoritative Guide to Global Space Activity, 2012, p. 25.

L'éventail croissant d'applications spatiales, de même que la recherche de prestige national et l'influence géopolitique, engendre un afflux de nouveaux intervenants souverains. À l'échelle mondiale, les dépenses gouvernementales dans le secteur spatial ont augmenté, alors même que la plus grande agence spatiale au monde, la National Aeronautics and Space Administration (NASA), a dû réduire ses dépenses. La Russie investit des milliards dans la revitalisation de son programme spatial. La Chine dépense des milliards pour devenir une importante puissance spatiale. Le Royaume-Uni, le Japon et le Brésil ont restructuré la façon de gouverner leurs programmes spatiaux pour mieux poursuivre leurs priorités nationales. Des dizaines d'autres pays, parmi lesquels Israël, l'Inde, l'Iran, la Corée du Sud, l'Indonésie, l'Ukraine, la Turquie et l'Australie, ont lancé leurs propres satellites ou créé leurs premiers programmes spatiaux nationaux.

Figure 7 : Nombre de pays ayant des satellites (lancés de façon indépendante ou par l'intermédiaire d'un tiers), de 1957 à 2009
Figure 7 : Nombre de pays ayant des satellites (lancés de façon indépendante ou par l'intermédiaire d'un tiers), de 1957 à 2009

Description de la figure

Ce diagramme illustre l'augmentation constante du nombre de pays qui ont mis des satellites en orbite, soit de façon indépendante ou en ayant recours aux services de lancement d'un autre pays. En 1957, un seul pays avait lancé un satellite. Ce nombre était passé à 10 en 1970, cinq pays possédant leurs propres capacités de lancement. En 1981, 18 pays avaient des satellites en orbite et huit avaient des capacités de lancement. En 1992, 26 pays avaient lancé des satellites avec succès, 10 pays l'ayant fait de façon indépendante. En 2009, l'année la plus récente pour laquelle des données sont disponibles, 52 pays, dont 11 avaient des capacités de lancement indépendantes, avaient lancé des satellites.

Source : Organisation de coopération et de développement économiques, The Space Economy at a Glance 2011.
Note : Les points de données sont présentés uniquement pour les années où il y a eu une augmentation.

L'éventail croissant d'applications spatiales, de même que la recherche de prestige national et l'influence géopolitique, engendre un afflux de nouveaux intervenants souverains. À l'échelle mondiale, les dépenses gouvernementales dans le secteur spatial ont augmenté, alors même que la plus grande agence spatiale au monde, la National Aeronautics and Space Administration (NASA), a dû réduire ses dépenses. La Russie investit des milliards dans la revitalisation de son programme spatial. La Chine dépense des milliards pour devenir une importante puissance spatiale. Le Royaume-Uni, le Japon et le Brésil ont restructuré la façon de gouverner leurs programmes spatiaux pour mieux poursuivre leurs priorités nationales. Des dizaines d'autres pays, parmi lesquels Israël, l'Inde, l'Iran, la Corée du Sud, l'Indonésie, l'Ukraine, la Turquie et l'Australie, ont lancé leurs propres satellites ou créé leurs premiers programmes spatiaux nationaux.

Parallèlement à l'augmentation du nombre de nations présentes dans l'espace, on observe un intérêt pour la collaboration internationale. Celle-ci permet aux pays participants de se partager les principaux risques, coûts et avantages liés au développement, à la fabrication et à l'exploitation d'actifs spatiaux, que ce soit pour la prestation de services publics, à des fins d'exploration ou à des fins scientifiques. Les efforts de collaboration ont également été stimulés par la nécessité de gérer un environnement spatial opérationnel de plus en plus encombré.

Étant donné le nombre d'applications satellitaires utilisées pour fournir des services publics et appuyer les opérations militaires, l'activité spatiale demeure principalement financée par des fonds publics. Néanmoins, la croissance de l'activité du secteur privé constitue une tendance importante au sein de l'industrie spatiale mondiale. La construction et l'exploitation de satellites pour les besoins des télécommunications sont depuis longtemps commercialement viables. On a toutefois assisté, au cours des dernières années, à une hausse du nombre d'applications satellitaires pour lesquelles les entreprises privées et les citoyens sont prêts à payer — particulièrement dans les domaines de la télédétection, de la cartographie et de la navigation — et au développement de petits satellites qui réduisent considérablement le coût d'entrée dans l'espace pour les entreprises privées.

[traduction] « L'espace commercial […] évoque un paradigme qui gagne du terrain aux États-Unis et dans le reste du monde. Cette expression, aussi désignée par le terme nouvel espace, renvoie à l'élargissement du champ d'action des entreprises et industries spatiales au-delà de la sphère traditionnelle des activités spatiales gouvernementales pour développer des technologies de vols spatiaux beaucoup moins chères et ouvrir de nouveaux marchés qui tirent parti des possibilités intéressantes offertes par ce type de vols. Parallèlement à cette nouvelle tendance, un nombre en forte croissance de petites et moyennes entreprises aérospatiales relativement nouvelles s'attachent à limiter autant que possible leurs frais généraux et à rationaliser leurs activités pour réduire considérablement le coût des technologies permettant l'accès à l'espace et l'exercice d'activités spatiales, et préconisent des politiques progressistes pour stimuler la croissance de l'industrie.

[…] L'espace commercial ou le nouvel espace ne fait pas nécessairement référence aux nouvelles technologies, mais plutôt aux nouvelles applications, aux nouveaux marchés et aux façons non traditionnelles de financer et de mener les activités spatiales, de même qu'à l'émergence de nombreuses petites entreprises qui cherchent à mener ces activités de manière concurrentielle. »

Canadian Space Commerce Association, Fostering Innovation, Creating New Markets: Novel Approaches to Space Policy and Programs, mémoire présenté dans le cadre de l'Examen de l'aérospatiale.

Ces dernières années, on a également assisté à l'établissement d'entreprises privées de lancement — en partie en réponse aux efforts déployés par la NASA pour impartir la livraison de cargaisons et de transport d'équipages en orbite basse — et à l'arrivée d'investisseurs prêts à se risquer dans le tourisme spatial et l'exploitation minière dans l'espace. En plus de s'adonner à des activités spatiales lucratives, les entreprises privées commercialisent de plus en plus les technologies spatiales pour des applications non spatiales dans des domaines comme la gestion des ressources naturelles et la médecine.

Ces tendances soulignent l'importance croissante de l'activité spatiale et laissent entrevoir les défis auxquels fait face le Canada ainsi que les possibilités qui se présentent.

Partie 2
Contexte (suite)

Chapitre 2.4
Possibilités et défis

L'industrie spatiale amorce une période très dynamique, et les 20 à 30 prochaines années offriront aux secteurs privé et public de nombreuses possibilités de promouvoir la sécurité nationale, l'exploitation des ressources et la prestation d'un large éventail de services publics et privés grâce aux technologies, aux applications et aux actifs spatiaux.

L'une des possibilités les plus importantes a trait au rôle que les satellites et l'infrastructure terrestre connexe peuvent jouer dans la promotion et la gestion de l'ouverture du Nord. Les satellites faciliteront la détection des gisements minéraux et nous aideront à surveiller les répercussions des mines et des puits de pétrole et de gaz. Ils nous permettront de mieux appliquer les normes environnementales ainsi que de surveiller et de comprendre le rythme et les effets des changements climatiques. De plus, ils permettront une navigation plus sûre sur les routes maritimes et aériennes du Nord. Enfin, ils appuieront la prestation de services d'éducation, de santé et d'intervention d'urgence aux petites collectivités nordiques dispersées, qu'elles existent depuis des siècles ou qu'elles se soient établies en raison d'une nouvelle activité économique.

[traduction] « Compte tenu des répercussions du réchauffement planétaire sur le climat de l'Arctique et des enjeux de souveraineté connexes, de la forte expansion prévue de l'exploration et de la mise en valeur des ressources, de l'accroissement du trafic maritime et des besoins liés au développement socio-économique du Nord, il existe un argument clair et convaincant selon lequel l'investissement dans le secteur spatial constitue une solution rentable pour mettre en place l'infrastructure requise qui contribuera aux résultats positifs en matière de développement.

Dans certains cas, l'analyse de rentabilité de ces investissements séduira l'industrie, qui y souscrira. Il s'agit généralement d'un soutien direct à l'exploration et à la mise en valeur des ressources dans le Nord ainsi qu'aux industries secondaires, notamment aux transports et à la logistique. […]

Toutefois, dans d'autres cas, la population dispersée du Nord ou la politique publique actuelle rendent non rentable l'investissement purement commercial dans l'infrastructure spatiale. Mentionnons, par exemple, des énormes investissements privés dans l'infrastructure de télécommunications dans le Nord plutôt que des investissements plus lucratifs dans des régions populeuses, ou encore la construction d'une infrastructure de prévisions météorologiques alors que les citoyens y ont accès gratuitement. […] Le développement responsable et la protection du Nord canadien ne sont pas seulement des besoins de développement à court terme, mais plutôt […] des besoins à long terme, stratégiques et vitaux… »

Norstrat Consulting, Canada's Space Sector: The Essential Enabler of Canada's Northern Strategy, rapport de recherche commandé dans le cadre de l'Examen de l'aérospatiale, juillet 2012.

Grâce à une forte présence dans le Nord, et en utilisant les satellites comme instruments clés de politique, le Canada sera en mesure d'accélérer la création de richesses, de protéger l'environnement et d'affirmer sa souveraineté. Compte tenu de l'intensification de plusieurs revendications nationales conflictuelles dans l'Arctique, le droit international et la géopolitique pragmatique exigent que le Canada soit actif dans la région s'il souhaite y protéger ses intérêts.

Outre le Nord, les concepteurs, les constructeurs et les exploitants de satellites, de composantes de satellites, de stations terrestres et de services de traitement de données ont la possibilité de répondre à la demande croissante dans des secteurs aussi divers que l'agriculture de précision, qui optimise l'utilisation de l'équipement, de l'irrigation et des engrais; les transports et la planification urbaine; la météorologie; et l'offre de produits d'information, de divertissement et autres à une clientèle sans cesse grandissante.

« Le Canada est le deuxième pays du monde en superficie et possède le plus long littoral de la planète. En vertu de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, le Canada revendique une zone économique exclusive le long de notre littoral équivalant à plus de 70 % de notre masse terrestre. La protection et la gestion d'une zone aussi vaste constituent un défi de taille. En effet, 75 % de notre population vit à moins de 160 km de la frontière américaine, si bien que le reste de notre territoire est peu densément peuplé et difficile d'accès. Nous vivons dans un pays arctique dont le territoire nordique constitue plus de 40 % de notre masse terrestre. En raison de ces caractéristiques géographiques et démographiques, il est extrêmement difficile pour les gouvernements de fournir l'infrastructure essentielle à notre croissance économique et sociale et de gérer nos responsabilités nationales et internationales en matière de sûreté, de sécurité et de saine gestion des ressources. […] Dans un pays aussi vaste et aussi peu densément peuplé que le Canada, les technologies spatiales jouent un rôle exceptionnel et vital en nous aidant à communiquer ensemble et à surveiller notre territoire en vue de saisir les occasions et de contrer les menaces. »

Rapport final du Groupe de travail sur l'espace, septembre 2012.

Enfin, de nouvelles possibilités découlent de l'accroissement exponentiel de l'utilisation de l'espace. On observe, par exemple, un intérêt accru pour le prolongement de la durée de vie des satellites opérationnels grâce à des missions de ravitaillement en carburant et d'entretien. En outre, alors que les pays et les entreprises sont de plus en plus nombreux à envoyer des actifs dans l'espace, on reconnaît davantage la nécessité de repérer les débris spatiaux et de réduire l'encombrement causé par des actifs spatiaux hors service. Ainsi, les satellites opérationnels seront protégés, et de nouveaux actifs pourront être placés en orbite sans risques majeurs de dommages ou d'avaries causés par d'autres objets flottants. Même les actifs spatiaux en bon état devront être gérés et coordonnés attentivement dans le patrimoine mondial de plus en plus fréquenté qu'est l'espace circumterrestre.

Figure 8 : Statut des objets artificiels en orbite, 2012

Figure 8 : Statut des objets artificiels en orbite, 2012

Description de la figure

Ce diagramme à secteurs montre la ventilation du statut des objets artificiels mesurant au moins 10 centimètres actuellement en orbite. Les fragments et les satellites inactifs constituent 87 % des objets artificiels actuellement en orbite, suivis des corps de fusée (8 %) et des charges utiles et des satellites fonctionnels (5 %).

Source : Joint Space Operations Center du Space Surveillance Network des États-Unis, données de mai 2012.
Inclut les objets d'au moins dix centimètres, soit environ 22 000 objets au total.

Les satellites ou engins spatiaux opérationnels ne constituent qu'une très petite proportion des objets artificiels en orbite. Le reste — notamment les fragments d'équipement détruit, les corps de fusées hors d'usage et les satellites inactifs — est considéré comme des débris. Comme ces objets font le tour de la Terre à près de 30 000 km/h, toute collision avec des satellites ou des engins spatiaux habités pourrait être catastrophique. Les puissances spatiales reconnaissent les problèmes que pose le nombre croissant de débris en orbite et discutent activement de stratégies de dépollution, notamment par l'entremise du Comité de coordination inter-agences sur les débris spatiaux, auquel participent 11 pays, dont le Canada.

L'enlèvement des débris et des satellites inactifs requiert une reconnaissance précise des objets en orbite et la capacité de les rassembler en vue de leur élimination en bonne et due forme. En ce qui a trait à la première exigence, le Canada se prépare à lancer son premier satellite militaire, appelé Sapphire, qui suivra en temps opportun la trajectoire des objets dans l'espace. Quant à la seconde exigence, le Canada possède un savoir-faire reconnu à l'échelle mondiale en robotique spatiale, qui pourra être mis à profit pour développer l'équipement permettant la récupération des objets spatiaux.

Compte tenu des possibilités de transformation qui voient le jour relativement aux technologies et applications spatiales, les dépenses publiques mondiales au titre des activités spatiales et l'industrie spatiale commerciale connaissent une forte croissance. Il ne faudrait négliger aucun des deux marchés.

L'industrie spatiale canadienne est bien placée pour tirer parti de ces possibilités. L'un des principaux avantages comparatifs du secteur est sa grande compétence relativement à plusieurs technologies spécialisées, chacune se rapportant à sa façon à la myriade de nouvelles demandes :

  • Les télécommunications par satellite sont essentielles pour répondre à la demande des consommateurs en matière de communications à large bande et de services d'information, et aux exigences du gouvernement se rapportant à la prestation de services et aux déploiements militaires.
  • La robotique spatiale continuera d'être cruciale pour les missions scientifiques et d'exploration financées par les fonds publics, ainsi que pour les initiatives qui s'attaquent à l'encombrement de l'espace et prolongent la durée de vie des actifs en orbite.
  • L'instrumentation optique et l'observation radar de la Terre prendront de plus en plus d'importance dans le contexte de la gestion des ressources naturelles, de la surveillance de l'environnement et de la collecte de renseignements.
  • Les petits satellites sont de plus en plus attrayants pour les gouvernements et les entreprises privées qui désirent effectuer des activités clés dans l'espace à moindre coût et dans des délais plus courts qu'avec des gros satellites.

Par ailleurs, le fait que le Canada soit un chef de file mondial dans les techniques d'exploitation minière permet aux entreprises canadiennes de participer à d'éventuelles initiatives à long terme d'exploitation minière dans l'espace et d'utiliser des actifs spatiaux pour appuyer l'extraction des ressources sur Terre. L'exploitation de minéraux rares dans l'espace demeure très théorique, mais elle suscite néanmoins l'intérêt du secteur privé; dans 25 ou 50 ans, elle pourrait devenir lucrative. Entretemps, les applications spatiales qui facilitent l'exploitation minière ou d'autres activités liées aux ressources naturelles sur Terre se multiplient rapidement.

La géographie du Canada présente également des avantages pour son secteur spatial. D'une part, la vaste étendue du pays et sa situation septentrionale requièrent et, par conséquent, stimulent le développement de solutions technologiques satellitaires qui peuvent être vendues à l'étranger et souvent servir à d'autres fins. D'autre part, le Nord est un emplacement idéal pour les stations terrestres, étant donné que la plupart des satellites d'observation terrestre se trouvent en orbite polaire et passent au-dessus de l'Arctique canadien à chaque orbite. Cet avantage naturel peut être exploité par des entreprises qui cherchent un gain commercial et par des organismes publics qui cherchent à améliorer la collaboration avec d'autres pays grâce à des installations recevant des données par satellite et pouvant être utilisées pour commander et contrôler les satellites.

[traduction] « De plus en plus, les besoins complexes en services de télécommunications et de données sont satisfaits à l'aide de systèmes souples à faible coût utilisant des microsatellites ou de petits satellites. La prolifération de solutions reposant sur de petits satellites témoigne de cette tendance dans le monde, et nombre d'entre elles sont de véritables histoires de réussite. […] Parmi les autres avantages de la réalisation d'un nombre croissant de missions plus petites, mentionnons les suivants :

  • l'abordabilité, ce qui permet de répartir les activités de la mission entre un plus grand nombre d'intervenants canadiens, tant de l'industrie que du milieu académique;
  • l'augmentation des dépenses qui vont directement au développement de la technologie, ce qui contribue au renforcement des capacités dans de nouveaux créneaux pour les marchés d'exportation;
  • la répartition du risque sur un portefeuille plus large. »

Source : COM DEV International, Aerospace Review: COM DEV's Recommendation for a Guiding Framework for Canadian Investments in Space, mémoire présenté dans le cadre de l'Examen de l'aérospatiale.

Enfin, le secteur spatial canadien dispose d'un solide ensemble de réseaux mondiaux et d'une réputation enviable reposant sur les nombreuses réussites à son actif. Pensons par exemple à toutes les réalisations de l'industrie dans le cadre de missions spatiales et à son succès sur le plan des exportations; aux technologies hautement visibles comme les Canadarms, qui font connaître le savoir-faire canadien à l'échelle mondiale; à la participation du pays à des initiatives spatiales internationales, ce qui consolide sa réputation de collaborateur fiable et d'avant-garde; aux liens que l'ASC a noués avec d'autres agences spatiales, en particulier la NASA et l'Agence spatiale européenne (ASE); au Programme des astronautes canadiens qui a remporté un grand succès; et à la participation du Canada au Conseil de l'Arctique, dont les membres partagent des intérêts communs dans le Nord et peuvent être des partenaires dans des initiatives spatiales conjointes.

Malgré ces points forts sur le plan technologique et géographique et cette solide réputation, le secteur spatial canadien fait face à certains défis qui, s'ils ne sont pas surmontés, risquent de nuire à sa capacité de tirer parti des possibilités et de répondre aux besoins du pays.

Figure 9 : Satellites civils à lancer par sous-secteur, de 2011 à 2020

Total des satellites civils à lancer : 531

Figure 9 : Satellites civils à lancer par sous-secteur, de 2011 à 2020

Description de la figure

Ce diagramme à secteurs montre le nombre de satellites civils dont le lancement est prévu entre 2011 et 2020, par sous-secteur. Sur les 531 satellites civils dont le lancement est prévu au cours de cette période, 195 sont destinés à l'observation de la Terre, 115 aux sciences et à l'exploration, 68 aux télécommunications par satellite, 67 à la navigation, 47 à la météorologie et 39 à la démonstration de la technologie.

Source : Euroconsult.

Le premier défi se situe du côté du gouvernement : l'objectif du Programme spatial canadien et son rôle dans la prestation des services et la concrétisation des priorités nationales ne sont pas clairement définis. Ce manque d'orientation semble remonter à au moins 10 ans et s'est manifesté par une planification déficiente, des budgets instables et de la confusion quant aux rôles respectifs de l'ASC et des ministères qui sont de grands utilisateurs de l'espace. Dans un secteur où les projets sont, par définition, coûteux, complexes et de longue haleine, il est particulièrement important d'avoir des objectifs concrets, un financement prévisible et une mise en œuvre méthodique.

Le deuxième défi se situe du côté du secteur privé : la concurrence est limitée et, dans certains cas, il y a une dépendance excessive à l'égard des dépenses publiques. Cette situation reflète en partie le fait que le marché spatial canadien est trop petit pour accueillir un nombre élevé de grands acteurs et que les gouvernements du monde entier demeurent les principaux acheteurs d'actifs spatiaux. Par conséquent, beaucoup d'entreprises canadiennes se sont spécialisées dans les marchés publics et en sont devenues dépendantes. La situation est également attribuable aux approches adoptées lors des premiers jours du Programme spatial canadien, quand des responsables fédéraux ont travaillé avec des entreprises canadiennes pour se répartir les activités d'approvisionnement dans le domaine spatial. Bien qu'il soit important de faire preuve de pragmatisme quant à la taille de l'industrie et d'encourager la collaboration, les entreprises privées doivent faire face aux contraintes de la concurrence à mesure que le secteur se développe dans le monde.

Ceci nous amène au troisième défi : les exemptions prévues dans les règles du commerce international pour des raisons de sécurité sont généralement interprétées comme s'appliquant aux programmes spatiaux. Ainsi, les États disposant de budgets élevés et d'un vaste marché spatial se permettent de favoriser nettement leurs entreprises nationales. Ces pratiques entravent la capacité des entreprises spatiales canadiennes de diversifier leurs marchés, mais des ententes bilatérales entre gouvernements peuvent en partie permettre de surmonter cet obstacle. Un défi connexe concerne le contrôle des exportations et les restrictions imposées par les lois américaines à la collaboration avec la Chine dans le domaine spatial. Les entreprises canadiennes peuvent donc être confrontées à un choix difficile : continuer de faire des affaires aux États-Unis, qui demeurent le plus grand acteur au monde dans le secteur spatial et le meilleur client de l'industrie canadienne, ou essayer de pénétrer le marché en forte croissance de la Chine et d'autres pays.

Le dernier défi concerne l'absence de capacité de lancement au Canada, ce qui signifie que l'ASC et les entreprises canadiennes doivent avoir recours aux systèmes de lancement d'autres pays pour mettre des satellites en orbite. Cette dépendance peut entraîner des retards, des complications opérationnelles et des dépassements de coûts, et le problème peut s'aggraver si l'utilisation de petits satellites continue de croître rapidement.

Les possibilités et les défis auxquels fait face le secteur spatial canadien indiquent la voie à suivre.

Partie 3
Analyse et recommandations

Nombre des recommandations figurant dans le premier volume, le rapport complémentaire sur le secteur de l'aérospatiale, s'appliquent aussi au secteur de l'espace. On y recommande notamment au gouvernement :

  • d'ajouter l'aérospatiale et l'espace à la liste des secteurs stratégiques déterminés dans la Stratégie des sciences et de la technologie du gouvernement;
  • de maintenir à son niveau actuel le financement de l'Initiative stratégique pour l'aérospatiale et la défense (ISAD) — déduction faite des réaffectations recommandées dans le volume complémentaire portant sur le secteur de l'aérospatiale — et de modifier les modalités de l'ISAD afin d'en faire un programme plus efficace pour stimuler le développement des technologies aérospatiales et spatiales de l'avenir;
  • de participer au financement d'une initiative pancanadienne pour faciliter la communication et la collaboration entre les entreprises, les chercheurs et les établissements d'enseignement supérieur;
  • de simplifier et de rationaliser les procédures de demande et de présentation de rapports pour les programmes utilisés par l'industrie, en particulier dans le cas des petites entreprises qui demandent une aide modeste, et d'avoir recours à un portail Internet à guichet unique pour donner de l'information sur ces programmes et fournir des liens pour les trouver;
  • de négocier des accords bilatéraux avec les pays où un marché potentiel et des possibilités de partenariat sont susceptibles de bénéficier au Canada et aux secteurs canadiens de l'aérospatiale et de l'espace;
  • d'examiner les régimes de contrôle des exportations et de contrôle intérieur pour s'assurer qu'ils ne sont pas inutilement restrictifs et que les permis d'exportation sont délivrés promptement;
  • d'utiliser les programmes fédéraux — en collaboration avec l'industrie, le milieu académique, les syndicats et les provinces — pour inciter les jeunes à étudier en sciences, en technologie, en ingénierie et en mathématiques en général, et à faire carrière dans les industries aérospatiale et spatiale en particulier, pour aider les étudiants des collèges et des universités à acquérir des compétences pertinentes, pour faciliter la transition des nouveaux diplômés vers le monde du travail dans les industries de l'aérospatiale et spatiale, et pour attirer des travailleurs qualifiés des industries aérospatiale et spatiale de l'étranger lorsque les efforts déployés pour accroître l'offre de main-d'œuvre au Canada ne permettent pas de répondre à la demande;
  • de développer des mécanismes pour appuyer les efforts déployés par les entreprises afin de s'assurer, grâce au perfectionnement continu des compétences, que leur effectif demeure souple et à la fine pointe de la technologie;
  • de financer — conjointement avec l'industrie, les provinces et les établissements d'enseignement supérieur et de recherche — l'acquisition et l'entretien des infrastructures de pointe qui sont nécessaires pour assurer la formation et la recherche.

Le volume 1 contient de l'information détaillée sur l'analyse sous-tendant ces recommandations et sur les mesures proposées pour les mettre en œuvre. Le reste du présent rapport est consacré à l'analyse et aux recommandations propres au secteur spatial canadien.

Partie 3
Analyse et recommandations (suite)

Chapitre 3.1
Établir des priorités et des plans clairs

Les programmes publics se rapportant à l'espace doivent reposer sur des priorités soigneusement examinées, qui tiennent compte des besoins et des avis d'un large éventail d'utilisateurs et d'intervenants et qui sont concrétisées grâce à des plans rigoureux et à un financement stable.

Certes, l'établissement et le respect appropriés des priorités sont toujours nécessaires quand les gouvernements doivent faire des choix concernant l'utilisation de ressources publiques limitées, à plus forte raison quand chaque projet mobilise plusieurs intervenants et requiert beaucoup de temps et de ressources, une conception unique, un procédé de fabrication spécialisé et des essais rigoureux répétés tout au long du processus. L'absence de priorités et de plans clairs accroît les risques que des montants importants de fonds publics soient dépensés sans engendrer suffisamment de répercussions positives sur l'économie nationale, la sécurité et la prestation de services publics. Dans un secteur aussi important et complexe que l'espace, l'improvisation est coûteuse, inefficace et contre-productive.

Il est également important pour l'industrie que le programme spatial public ait une orientation précise, étant donné que le gouvernement demeure le principal client d'actifs spatiaux en dehors des télécommunications par satellite à usage commercial. Les entreprises ont besoin d'un niveau raisonnable de prévisibilité sur leur marché pour prendre des décisions commerciales judicieuses et utiliser adéquatement les fonds et les ressources nécessaires.

« Il est très difficile pour les acteurs de l'industrie canadienne, petits ou grands, de planifier les investissements en ressources financières et humaines, de maintenir la capacité après que l'aide d'un programme de l'État prend fin et avant que l'aide d'un autre programme commence, d'investir des montants considérables dans la [recherche-développement (R-D)] sans aucune certitude quant à savoir quels programmes de l'État, programmes de développement technologique et programmes de démonstration en vol seront mis en œuvre et quand ils seront lancés. L'industrie doit également comprendre l'orientation des politiques gouvernementales clés qui influent sur la compétitivité, comme les politiques régissant l'approvisionnement, le capital de risque pour la commercialisation de la R-D, le contrôle des exportations ou les données et les cadres réglementaires qui influent sur le secteur des services. […]

L'exécution des projets spatiaux s'étend généralement sur une période de deux à cinq ans, qui fait suite dans chaque cas à une période tout aussi longue d'analyse des besoins, de définition du concept ou du projet, ainsi que de définition et de développement de la technologie. Compte tenu de ce modèle, tous les projets ont besoin d'une planification à long terme et de communications continues entre les représentants du gouvernement, des universités et de l'industrie afin de maximiser le rendement de leur main-d'œuvre extrêmement compétente et de leurs installations de recherche et de fabrication spécialisées. »

Rapport final du Groupe de travail sur l'espace, septembre 2012.

Pour certains pays ayant un programme spatial d'une envergure comparable à celui du Canada, ces considérations ont débouché sur la révision des mécanismes de gouvernance s'appliquant aux activités spatiales. Ces changements visaient à accroître la participation des ordres de gouvernement les plus élevés à l'établissement des priorités générales des programmes, à encourager la coordination entre les ministères, à préciser les rôles des agences spatiales nationales et à faire participer plus activement le secteur privé. Ainsi :

  • Le Royaume-Uni a établi pour la première fois une agence spatiale, laquelle relève directement du ministre d'État (Universités et Sciences). C'est à elle qu'incombe la responsabilité globale de l'activité spatiale civile du pays financée par des fonds publics. Les ministères, les établissements de recherche, l'industrie et les organismes non gouvernementaux subventionnés par l'État menant des activités spatiales siègent au Space Leadership Council, qui fournit des avis au ministre et à l'agence sur les priorités nationales dans le domaine spatial.
  • Le Japon a créé un comité du Cabinet, présidé par le premier ministre et appuyé par un secrétariat spécial au sein de son Cabinet. Ce comité a pour mandat d'établir les priorités nationales dans le domaine spatial, de coordonner les activités spatiales au sein du gouvernement et de renforcer le rôle du secteur privé dans le programme spatial japonais. Le rôle de l'agence spatiale du pays, JAXA, a été clarifié : l'agence est responsable de la recherche, de la formulation d'avis et de la mise en œuvre, mais non de l'établissement de politiques.
  • Le Brésil a établi un conseil national sur la politique spatiale formé de ministres et dirigé par le président. Il a également renforcé le mandat de son agence spatiale afin d'établir les priorités du programme spatial du pays et de coordonner la concrétisation de ces priorités. Comme l'agence japonaise JAXA, l'Institut national de recherche spatiale du Brésil se consacre essentiellement à la recherche et à la mise en œuvre.

Figure 10 : Budget spatial de certains pays membres et non membres de l'OCDE en pourcentage du PIB, 2009

Figure 10 : Budget spatial de certains pays membres et non membres de l'OCDE en pourcentage du PIB, 2009

Description de la figure

Ce diagramme à barres horizontales présente le budget spatial de 26 pays membres et non membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2009 en pourcentage du produit intérieur brut (PIB). Parmi ce groupe, la Suède disposait du budget spatial le moins élevé, soit 0,002 % du PIB, alors que les États-Unis avaient le budget le plus élevé (0,309 %). Le Canada arrivait en 15e position, avec un budget représentant 0,024 % du PIB. Il était devancé par les pays suivants (dans l'ordre décroissant de leur budget) : les États-Unis, la Fédération de Russie, la Chine, la France, le Japon, l'Inde, la Belgique, l'Allemagne, l'Italie, Israël, la Norvège, la Finlande, la Corée et le Luxembourg.

Source : OCDE.
OCDE = Organisation de coopération et de développement économiques
PIB = produit intérieur brut

Même si son programme spatial public a connu de nombreuses réussites et jouit d'une bonne réputation à l'étranger, le Canada peut s'inspirer des mesures prises par d'autres pays pour rehausser la priorité de l'espace, clarifier les responsabilités et assurer une meilleure gestion au sein de plusieurs programmes et ministères.

En réalité, au cours des 10 dernières années, tandis que d'autres protagonistes ont modernisé leurs programmes spatiaux en adoptant des stratégies nationales et en renforçant la gouvernance, les priorités du Canada étaient ambiguës, et la mise en œuvre laissait à désirer. Nous n'avons pas exprimé clairement et de manière générale ce que nous voulions faire dans l'espace ni comment nous comptions nous y prendre. Il n'existe aucun mécanisme clair pour gérer les activités spatiales au sein du gouvernement. Des projets comme la mission Constellation RADARSAT ont été annoncés, pour disparaître complètement, puis réapparaître par la suite. Le budget de l'ASC a été réduit, même si le Canada a pris de nouveaux engagements comme le prolongement de sa participation à la Station spatiale internationale jusqu'en 2020. De plus, la position dominante du Canada en ce qui a trait à des technologies clés comme la robotique spatiale et l'instrumentation optique est fragilisée, en partie en raison de la plus grande détermination d'autres pays à l'égard de leurs programmes spatiaux.

Il est indispensable de mettre en place un programme spatial canadien dynamisé et bien ciblé grâce à des objectifs clairs, d'obtenir un solide engagement soutenu des intervenants et un financement stable, et d'assurer une planification et une mise en œuvre plus rigoureuses.

Recommandation no 1 : Priorités du Programme spatial canadien

Le Programme spatial canadien parviendra mieux à promouvoir l'intérêt national et à fournir des services aux Canadiens s'il repose sur des priorités établies aux plus hauts niveaux après une consultation en bonne et due forme des pouvoirs publics, de l'industrie et des chercheurs. Dans l'ensemble, ces priorités devraient être stables, étant donné que le développement et le déploiement d'un actif spatial prennent plusieurs années et requièrent l'engagement soutenu de ressources publiques et privées.

Il est recommandé que le gouvernement reconnaisse explicitement l'importance des technologies et de la capacité spatiales pour la sécurité nationale, la prospérité économique et la croissance durable, et que le ministre de l'Industrie présente chaque printemps des priorités gouvernementales annuelles, quinquennales et décennales pour le Programme spatial canadien au Comité du Cabinet chargé des priorités et de la planification, dirigé par le premier ministre, aux fins de discussion et d'approbation.

Ces priorités devraient :

  • être établies à la lumière des avis des ministres de tous les portefeuilles intéressés, de concert avec les provinces et les territoires, l'industrie et les spécialistes d'établissements d'enseignement supérieur et de recherche; les avis proviendront en partie du conseil consultatif dont il est question à la recommandation no 2;
  • tenir compte des secteurs où les activités et actifs spatiaux peuvent avoir la plus grande incidence au chapitre de la défense des intérêts nationaux du Canada;
  • porter sur les activités et actifs civils et militaires;
  • cadrer avec les partenariats et engagements internationaux du Canada;
  • positionner l'industrie pour qu'elle tire pleinement parti des nouvelles possibilités, par exemple en renforçant la position dominante du Canada dans les créneaux technologiques;
  • être évaluées chaque année à la lumière de la nouvelle conjoncture.

Excepté s'il y a des faits nouveaux majeurs qui exigent un changement de cap, les priorités quinquennales et décennales devraient toujours demeurer cohérentes, tandis que les priorités annuelles devraient s'appuyer sur les priorités quinquennales et décennales et en tenir compte.

Une fois approuvées, les priorités devraient transparaître dans les mandats ministériels, étant entendu qu'un suivi soit effectué en temps opportun. Au besoin, les ministres devraient soumettre des propositions de projet plus détaillées aux fins d'approbation du Cabinet. Les priorités et projets approuvés devraient bien sûr orienter le processus d'établissement des budgets du gouvernement.

Pour aider l'industrie, les chercheurs et d'autres parties intéressées à planifier leur propre travail, un résumé des priorités et projets approuvés du Programme spatial canadien devrait être communiqué au Parlement et aux citoyens chaque année.

Même s'il existe de nombreux domaines sur lesquels le gouvernement pourrait souhaiter mettre l'accent dans son premier ensemble de priorités du Programme spatial canadien, les impératifs du développement et de la sécurité dans le Nord devraient presque certainement arriver en tête de liste. Les satellites et l'infrastructure terrestre connexe sont souvent les outils les plus efficients — et parfois les seuls — pour exploiter l'énorme richesse de la région, surveiller les conditions et répercussions environnementales, permettre les télécommunications entre les collectivités dispersées et la prestation de services de santé et d'éducation à ces collectivités, assurer la sécurité du transport aérien et maritime dans l'Arctique, protéger le périmètre du Nord, et affirmer la souveraineté canadienne.

Par ailleurs, le gouvernement devrait examiner, lorsqu'il établit des priorités, les façons de répondre aux besoins du pays en matière de capacité de lancement. Les secteurs public et privé du Canada font déjà face à des retards éventuels et à des coûts supplémentaires alors qu'ils attendent leur tour pour utiliser les lanceurs d'autres pays. L'accès à une capacité de lancement fiable deviendra plus important à mesure qu'on utilisera davantage les actifs spatiaux, notamment les petits satellites, pour répondre aux besoins du pays en matière d'économie, de sécurité et de prestation de services publics. S'il est vrai que le Canada pourrait difficilement assumer seul les coûts associés à la création d'une capacité de lancement, des efforts concertés avec des alliés ou nations proches aux prises avec les mêmes problèmes pourraient constituer un moyen d'assurer que les actifs canadiens se trouveront au début de la file de lancement au cours des décennies à venir.

Enfin, la première série de priorités devrait tenir compte de la façon dont le Canada utilisera pleinement et stratégiquement son droit d'accès aux laboratoires et à l'équipement de la Station spatiale internationale afin de faire avancer la recherche et le développement technologique de pointe au Canada.

Recommandation no 2 : Conseil consultatif

Les activités spatiales sont particulières. Elles requièrent le développement et le déploiement de technologies complexes souvent uniques dans un environnement hostile et inhospitalier où il n'existe pratiquement aucune deuxième chance ni possibilité de réparation et d'entretien. Par conséquent, l'expérience et les connaissances d'un large éventail de spécialistes sont nécessaires pour déterminer ce qui est faisable et souhaitable dans le contexte d'un programme spatial national.

La meilleure façon pour le gouvernement de recueillir ces avis consiste à asseoir à une même table des gens bien informés, qui exprimeront leur opinion de façon franche. Une telle approche peut réduire le nombre de discussions à organiser, améliorer la qualité des décisions et offrir des points de vue précieux sur les genres de compromis qui s'imposent dans un monde où les ressources sont limitées.

Il est recommandé que le gouvernement établisse un conseil consultatif canadien dans le domaine spatial qui relèvera du ministre de l'Industrie et dont les membres seront issus de l'industrie, des milieux académique et de la recherche, des provinces et territoires ainsi que des ministères et organismes fédéraux.

Le conseil consultatif devrait avoir pour mandat de formuler, à l'intention du ministre de l'Industrie, des avis sur les priorités et les plans du Programme spatial canadien, en tenant compte de facteurs comme :

  • les atouts actuels et éventuels de l'industrie spatiale et du milieu de la recherche canadiens dans des créneaux du secteur spatial;
  • les nouvelles technologies pouvant avoir des répercussions économiques positives grâce à un large éventail d'applications dans le secteur spatial et ailleurs;
  • les besoins en matière de prestation de services publics auxquels on pourrait répondre grâce à l'utilisation d'actifs spatiaux;
  • les possibilités de collaboration internationale à des initiatives spatiales.

Il importe que le conseil consultatif apporte des points de vue de l'extérieur du gouvernement et des quatre coins du pays. Il devrait par conséquent être présidé par une personne nommée qui soit neutre et extérieure à la fonction publique, et ses membres devraient inclure :

  • des représentants de l'industrie provenant de grandes, moyennes et petites entreprises;
  • des représentants des principaux programmes académiques et de recherche dans le domaine spatial;
  • des hauts responsables de l'ASC et des ministères et organismes fédéraux ayant des intérêts et des activités dans le domaine spatial, notamment ceux qui utilisent des satellites pour s'acquitter de leur mandat et ceux qui dirigent ou financent de la recherche dans le domaine spatial;
  • des hauts responsables des provinces et territoires intéressés par l'utilisation d'actifs spatiaux pour offrir des services dans leur province ou territoire.

Il pourrait être souhaitable que les hauts fonctionnaires participent aux discussions du conseil consultatif en tant que membres d'office, étant donné qu'ils ont à la fois la possibilité et l'obligation de fournir des avis stratégiques aux ministres par d'autres moyens.

Le Space Leadership Council de l'UK Space Agency

Le Space Leadership Council de l'UK Space Agency a été créé en réponse à une recommandation formulée par la Space Innovation and Growth Strategy (IGS), stratégie indépendante dirigée par l'industrie. L'IGS, lancée par le ministre des Sciences et de l'Innovation en 2009, a mené à un rapport final en 2010 qui définissait une stratégie sur 20 ans pour la croissance future de l'industrie spatiale britannique.

Le conseil est présidé conjointement par l'industrie et le gouvernement et est composé de hauts responsables de l'industrie, du milieu académique et de l'État. Il assume les tâches suivantes :

  • fournir des avis à l'agence spatiale sur son plan de travail et les possibilités futures;
  • offrir des avis sur les secteurs de l'activité spatiale où le Royaume-Uni devrait chercher à développer et à maintenir un leadership mondial;
  • promouvoir l'industrie spatiale du Royaume-Uni et son excellence scientifique dans la recherche, la technologie et les applications spatiales.

Source : UK Space Agency.

Recommandation no 3 : Gouvernance et mise en œuvre rigoureuses

L'orientation générale n'est utile que si elle est mise en œuvre adéquatement. Étant donné que les projets spatiaux sont compliqués et qu'ils présentent souvent des innovations sur le plan technologique, ils comportent un risque de faux départ et de détours inattendus. On sait par expérience que les grands projets spatiaux au Canada et à l'étranger ont souffert de problèmes de gestion, de dépassement de coûts et de non-respect des échéances. Dans un tel contexte, une gouvernance et une planification rigoureuses sont indispensables. Une fois que le Cabinet a montré le chemin à suivre, les ministères et organismes gouvernementaux doivent être bien organisés pour poursuivre dans la même voie.

Il est recommandé que soit créé un conseil de gestion du programme spatial au niveau des sous-ministres afin de coordonner les activités spatiales fédérales, que soient mises en place des ententes propres aux projets pour assurer une gestion rigoureuse, et que tous les ministères et organismes participant au Programme spatial canadien soient obligés de rendre compte de la façon dont ils mettent en œuvre les priorités établies par le Cabinet.

Un conseil de gestion du programme spatial formé de sous-ministres, avec à sa tête le sous-ministre de l'Industrie comme président et le président de l'ASC comme vice-président, devrait être chargé par le greffier du Conseil privé d'assurer la cohérence et la coordination des activités spatiales fédérales une fois que le Cabinet a approuvé les priorités. Le soutien et les avis au Conseil devraient émaner de l'ASC ainsi que des ministères dont relèvent les sous-ministres.

Le conseil devrait pour sa part mettre en œuvre des mesures pour s'assurer que les grands projets sont planifiés et menés à bien de la manière la plus rigoureuse qui soit. Il pourrait, par exemple, mettre en place des comités directeurs responsables d'un projet particulier, composés de représentants de l'ASC, de ministères et organismes fédéraux participant au projet, de gouvernements provinciaux et territoriaux intéressés et d'établissements de recherche. La participation à ces comités directeurs suivrait normalement le principe de l'utilisateur payeur : ceux qui financent un projet devraient avoir leur mot à dire sur la façon dont ce projet est conçu et mis en œuvre.

Pour fournir de l'information sur ces activités aux députés et aux citoyens et renforcer la reddition de comptes, les Rapports sur les plans et les priorités et les Rapports ministériels sur le rendement de l'ASC et de tous les ministères et organismes participant au Programme spatial canadien devraient préciser en détail comment ces organisations mettent en œuvre les priorités du Programme. Il faudrait tenir compte du respect adéquat des engagements dans le secteur spatial au moment d'évaluer le rendement des sous-ministres et des hauts dirigeants concernés.

Structure de gouvernance proposée pour le Programme spatial canadien
Structure de gouvernance proposée pour le Programme spatial canadien
Comité gouvernemental Rôle
Cabinet Établir des priorités gouvernementales annuelles, quinquennales et décennales pour le Programme spatial canadien sur l'avis du ministre de l'Industrie
Conseil consultatif canadien dans le domaine spatial Formuler des avis au ministre de l'Industrie sur les priorités et les plans du Programme spatial canadien
Conseil de gestion du programme spatial formé de sous-ministres Assurer la cohérence et la coordination des activités spatiales fédérales qui reflètent les priorités établies par le Cabinet

Recommandation no 4 : Financement prévisible

Dans un domaine où 10 ans peuvent s'écouler entre la conception d'un projet et sa mise en œuvre, des engagements financiers soutenus sont essentiels. L'incertitude budgétaire ne peut qu'amoindrir la valeur et accroître le risque pour les fonds publics, l'industrie privée et le milieu de la recherche.

La stabilité financière requiert la promesse explicite d'un soutien continu tant que les activités et les projets se déroulent comme prévu. Il ne s'agit pas d'un chèque en blanc : si des jalons n'ont pas été respectés, le gouvernement doit être en mesure d'exercer son pouvoir financier en tant qu'acheteur pour exiger un meilleur rendement. Cela ne signifie pas non plus que le gouvernement fédéral devrait assumer lui-même toutes les dépenses : étant donné le coût et la complexité des actifs spatiaux et les avantages de la collaboration, des modèles de financement à payeurs multiples conviendront souvent mieux que les modèles à payeur unique.

À l'intérieur de ces limites, toutefois, la prévisibilité du financement à long terme est essentielle à la gestion efficace et à la réussite d'un programme spatial national.

Il est recommandé que le financement de base de l'Agence spatiale canadienne soit stabilisé, en dollars réels, pour une période de 10 ans, qu'on ait recours à plusieurs sources au sein et à l'extérieur du gouvernement fédéral pour financer les grands projets et initiatives dans le domaine de l'espace, et qu'on continue d'accroître la collaboration internationale en vue de partager les coûts et les retombées de ces grands projets et initiatives.

Les sources de financement canadiennes pour les grands projets peuvent inclure :

  • l'ASC, dont le budget de base devrait lui permettre de contribuer modestement à chaque grand projet;
  • les ministères, organismes et organes de recherche fédéraux qui utiliseront l'actif ou l'initiative pour appuyer l'exécution de leur mandat;
  • les gouvernements provinciaux et territoriaux qui utiliseront l'actif ou l'initiative;
  • les établissements d'enseignement supérieur et de recherche qui souhaitent utiliser l'actif ou l'initiative comme plateforme de recherche;
  • les fabricants ou exploitants de l'actif, dans le cadre d'ententes de partenariat public-privé;
  • des affectations spéciales des coffres généraux de l'État, de la même façon que des affectations sont allouées à des projets d'infrastructure comme les ponts et les ports.

Figure 11 : Budget de base de l'Agence spatiale canadienne, de 2001-2002 à 2012-2013

Figure 11 : Budget de base de l'Agence spatiale canadienne, de 2001-2002 à 2012-2013

Description de la figure

Ce diagramme à colonnes présente l'évolution du budget de base de l'Agence spatiale canadienne de 2001-2002 à 2012-2013, en comparant le budget en dollars courants au budget en dollars constants de 2001. En dollars courants, le budget de base de l'Agence a atteint un sommet de 326 millions de dollars en 2001-2002 avant de chuter à 304 millions de dollars l'année suivante. Après avoir oscillé autour de 300 millions de dollars entre 2002-2003 et 2010-2011, le budget de base a diminué pour s'établir à 295 millions de dollars en 2011-2012 et à 286 millions en 2012-2013. En dollars constants de 2001, le budget de base de l'Agence a baissé constamment, passant d'un sommet de 326 millions de dollars en 2001-2002 à 229 millions de dollars en 2012-2013.

Sources : Agence spatiale canadienne, Statistique Canada.
Note : Le budget de base exclut le financement ponctuel au titre du Plan d'action économique du Canada ou pour les grands projets d'investissement.
Les dollars constants de 2001 sont calculés au moyen de l'indice des prix à la consommation, sur la base d'un taux d'inflation annuel de 2 % en 2012. Ils illustrent le pouvoir d'achat de l'Agence spatiale canadienne après prise en compte du coût croissant des produits et services au fil du temps attribuable à l'inflation annuelle.

La formule nationale de financement utilisée pour chaque projet devrait tenir compte de facteurs comme la nature du projet, la capacité et la volonté des utilisateurs éventuels de faire une contribution et la situation financière générale. Des affectations spéciales des coffres de l'État seront peut-être plus appropriées au début du cycle de vie du projet, quand les dépenses à engager risquent de dépasser la capacité de payer des utilisateurs, mais elles devraient diminuer au fil du temps. Cette formule serait conforme au schéma de financement de nombreux types d'infrastructure de base ou de développement.

Dans certains cas, la collaboration internationale sera cruciale pour la concrétisation d'un projet et son succès opérationnel à long terme. Depuis longtemps, le Canada travaille en étroite collaboration avec d'autres pays à des initiatives spatiales, ce qui lui a permis de renforcer sa visibilité et ses relations internationales, de faire reconnaître dans le monde entier les points forts de ses créneaux technologiques et d'avoir accès à des actifs de plusieurs milliards de dollars, comme la Station spatiale internationale et le rover Curiosity envoyé sur Mars, qu'il n'aurait jamais pu développer et fabriquer seul.

Partenariat avec l'Agence spatiale européenne

L'Accord de coopération Canada-Agence spatiale européenne permet aux entreprises spatiales canadiennes d'obtenir des contrats de l'Agence spatiale européenne (ASE) selon le principe du juste retour. Pour chaque dollar versé par le Canada aux programmes de l'ASE, les entreprises spatiales canadiennes peuvent obtenir un dollar en contrats de l'ASE.

Cette entente stimule l'innovation technologique et la compétitivité en offrant aux entreprises canadiennes un accès au marché spatial européen et en permettant la mise à l'essai des technologies grâce aux vols spatiaux. Dans l'ensemble, les entreprises canadiennes ont profité ou devraient profiter de 399 millions de dollars en recettes supplémentaires découlant des contrats de l'ASE et du travail de suivi.

Le logiciel de guidage, de navigation et de contrôle destiné aux satellites constitue un exemple de technologie élaborée dans le cadre de l'accord avec l'ASE. Ce logiciel, développé par NGC Aérospatiale, une entreprise du Québec, a été installé sur le satellite Proba-1 de l'ASE. Le logiciel prévoit à quel moment le satellite survolera une cible particulière, puis le place dans une position idéale pour la prise d'images. Avec l'aide de l'ASE, NGC a par la suite développé un logiciel de deuxième génération pour le satellite Proba-2. Ce logiciel permet au satellite de compenser les perturbations environnementales et d'éviter les interférences provenant de la Terre. Grâce à l'ASE, NGC a également eu la possibilité de tester en vol les technologies de guidage, de navigation et de contrôle pour les futures missions d'exploration et d'observation de la Terre. La technologie Proba est maintenant commercialisée au Canada et en Europe.

La réputation du Canada en tant que collaborateur fiable et expérimenté le place dans une position favorable pour renforcer sa collaboration avec :

  • les partenaires traditionnels que sont la NASA et l'ASE, lesquelles demeurent les plus grandes agences spatiales au monde;
  • les nouvelles puissances spatiales (et celles qui regagnent du terrain) comme la Russie, la Chine, l'Inde, le Brésil et le Japon. Lorsque le contrôle des exportations complique la collaboration avec ces pays, des efforts conjoints peuvent cibler les domaines non critiques pour la sécurité;
  • les membres du Conseil de l'Arctique, qui partageront probablement les intérêts du Canada pour le développement de satellites, de stations terrestres et d'une capacité de lancement de petits satellites afin d'appuyer le développement économique, la sécurité des transports, la prestation de services publics et la gérance de l'environnement dans les régions nordiques.

Partie 3
Analyse et recommandations (suite)

Chapitre 3.2
Effectuer des acquisitions

Les marchés publics servent de catalyseur au secteur spatial canadien depuis sa création. Comme le gouvernement a toujours été un client important des actifs spatiaux et du savoir-faire dans ce domaine, l'émergence et la croissance de l'industrie spatiale canadienne — et des programmes académiques et de recherche axés sur l'espace — sont étroitement liées aux achats du gouvernement fédéral, que ce soit pour ses propres projets ou pour des initiatives entreprises en collaboration avec les agences spatiales d'autres pays, plus particulièrement la NASA et, dans une moindre mesure, l'ASE.

Cela ne veut pas dire pour autant que le gros des revenus de l'industrie provient directement des gouvernements canadiens; en fait, seulement un cinquième des revenus intérieurs proviennent directement des gouvernements canadiens, et l'industrie tire la moitié de ses revenus de ses ventes à l'étranger, ce qui en fait l'une des industries les plus axées sur les exportations au monde. Cependant, la plupart des ventes à l'étranger concernent des produits et services éprouvés, en particulier dans les domaines des télécommunications par satellite, de l'observation de la Terre et du traitement de données.

Mise à l'essai des actifs spatiaux

L'espace est un environnement hostile et inhospitalier, qui laisse peu de place à l'erreur. Étant donné les délais et le coût de la mise en place de la technologie dans l'espace, les concepteurs et les acheteurs procèdent par étape, mettant tout d'abord la technologie spatiale à l'essai au sol de manière aussi rigoureuse que possible, puis en testant un petit prototype ou des composantes dans l'espace pour obtenir un « historique de vol ». La deuxième étape de la mise à l'essai est importante, car il peut être très difficile, voire impossible, de prouver sur la terre ferme qu'une technologie fonctionnera sans faille dans l'espace, à un niveau élevé de rendement et pendant un certain nombre d'années, sans guère nécessiter d'entretien.

Pour les essais au sol, l'industrie et le gouvernement peuvent entre autres utiliser le laboratoire David-Florida (LDF) de l'Agence spatiale canadienne. Le LDF offre des installations et du matériel spécialisés, ainsi que le personnel de soutien nécessaire pour assembler tout l'engin spatial, ses sous-systèmes et ses grandes composantes, et vérifier leur qualification pour voler dans l'espace.

La phase de l'établissement d'un historique de vol suppose généralement l'obtention d'un vol dans l'espace, souvent en s'associant à une mission spatiale non apparentée. Les gouvernements jouent habituellement un rôle crucial dans l'obtention de ces possibilités grâce à des ententes internationales et à des accords de financement.

Le nouvel instrument de détection infrarouge appelé NIRST (pour New InfraRed Sensor Technology) est un exemple de technologie associée à l'historique de vol. Il a été mis en orbite en même temps que sept autres instruments lors du lancement d'un satellite argentin en 2011. Le NIRST a pour but de surveiller les températures à la surface de l'océan et des points chauds comme les feux de forêt et les activités volcaniques. Les détecteurs utilisés dans cette technologie ont été mis au point dans le cadre d'un partenariat entre l'Agence spatiale canadienne et l'Institut national d'optique, un établissement québécois.

Quand il s'agit de grands progrès technologiques et de l'établissement de la crédibilité sur le marché, le rôle de l'approvisionnement public demeure crucial. Même si la situation évolue petit à petit, peu d'investisseurs privés sont prêts à assumer les coûts et les risques requis pour créer quelque chose de nouveau pour l'espace, et aucun n'a la capacité du gouvernement pour ce qui est de démontrer le potentiel d'un nouveau produit en obtenant un « historique de vol ».

Cela dit, l'approvisionnement public ne peut manifestement pas reposer exclusivement sur le renforcement du secteur spatial national. Il s'agit également de répondre aux exigences opérationnelles des organismes utilisateurs et d'obtenir le meilleur rapport qualité-prix pour les contribuables. Ces trois grands objectifs — le prix, le rendement et la capacité industrielle — sont ceux mentionnés dans le volume complémentaire sur l'aérospatiale lorsqu'il est question des achats publics d'aéronefs.

Si l'on veut atteindre ces objectifs, il faut, une fois que le Programme spatial canadien est assorti de priorités et de plans clairs, que la portée de chaque projet soit établie rapidement et que les demandes de propositions incitent à la réduction des coûts, à une plus grande innovation et à la participation d'entreprises et d'établissements de recherche canadiens.

Recommandation no 5 : Définition rapide de la portée des projets

Comme le développement de pointe, la construction et la mise à l'essai d'actifs spatiaux prennent des années, et que ces actifs sont souvent conçus pour recevoir plusieurs charges utiles à diverses fins, la portée initiale du projet est généralement élargie, ce qui entraîne une hausse des coûts et des retards.

Il est recommandé que soit établie le plus tôt possible pendant la phase de définition des projets spatiaux une version définitive de la portée, des délais et des exigences en matière de rendement.

La portée du projet devrait être :

  • suffisamment détaillée pour veiller à ce que l'actif fournisse les services requis, mais suffisamment générale pour donner aux soumissionnaires la marge de manoeuvre voulue pour proposer un éventail d'approches permettant de répondre à ces besoins. Dans les faits, cela se traduira par des spécifications qui reposeront davantage sur le rendement et seront moins détaillées que celles qui ont été utilisées jusqu'à présent;
  • approuvée par le fonctionnaire supérieur de la direction de tous les organismes participant au financement ou utilisant le bien, par exemple les sous-ministres des ministères fédéraux;
  • définitive dès son approbation, sauf si des circonstances extraordinaires justifient une révision ultérieure.

La portée et la gestion des projets sont essentielles à la réussite d'un programme spatial. Les changements à la portée, la prorogation des échéances ou les ponctions dans les fonds de contingence du projet devraient être approuvés par un fonctionnaire supérieur de la direction ou un sous-ministre.

Recommandation no 6 : Soumissions concurrentielles qui encouragent l'innovation, contrôlent les coûts et renforcent l'industrie canadienne

En général, l'achat d'actifs et de services spatiaux pour des besoins gouvernementaux au Canada prévoyait un appel d'offres restreint et la participation relativement importante de responsables de l'ASC tout au long du processus de conception et de fabrication.

Quand les technologies en étaient à leurs balbutiements et que la capacité industrielle canadienne était limitée, cette méthode convenait peut-être. Elle a aidé à développer le secteur spatial canadien et à faire en sorte que le gouvernement obtienne les biens dont il avait besoin. Cependant, les budgets ont été réduits, les technologies ont évolué et la capacité industrielle a augmenté, ce qui justifie la modernisation de notre méthode d'acquisition d'actifs spatiaux.

Ces actifs pourraient inclure des satellites plus petits, qui coûtent une fraction du prix des gros satellites, peuvent être conçus et construits relativement vite et sont de plus en plus en mesure de fournir des données et des services utiles. Même si certaines applications nécessiteront toujours une plus grande plateforme, on peut optimiser l'utilisation des ressources en cas d'achat d'équipement et de services spatiaux en examinant toutes les solutions technologiques et matérielles et en déterminant la combinaison idéale pour chaque projet.

Il sera plus facile de trouver la combinaison optimale si le gouvernement réclame et examine différentes approches chaque fois qu'il envisage un approvisionnement dans le domaine spatial. Dans tous les secteurs, comme l'a constaté le Groupe d'étude sur les politiques en matière de concurrenceNote 4 en 2008, l'intensité de la concurrence stimule l'innovation et produit de meilleurs résultats à des prix inférieurs pour les clients. C'est vrai non seulement quand les clients sont des citoyens, mais aussi quand le gouvernement fédéral effectue des achats pour le compte de la population canadienne. Même si le nombre de grandes entreprises dans le secteur spatial demeurera toujours relativement petit, étant donné les coûts et les difficultés liés à la conception et à la fabrication des actifs spatiaux, il y a maintenant assez d'intervenants pour créer une saine concurrence en vue de l'obtention des deniers publics consacrés à l'espace.

La concurrence ne doit pas se traduire par un effritement de l'engagement à tirer parti des marchés publics pour renforcer le secteur spatial canadien. Tant que le secteur repose dans une large mesure sur ces approvisionnements, et aussi longtemps que d'autres pays exempteront les achats spatiaux des règles commerciales et les utiliseront pour encourager leurs propres secteurs, les répercussions positives sur l'industrie spatiale et le milieu de la recherche canadiens devraient être prises en compte lorsque des ressources publiques sont utilisées pour acheter des satellites et d'autres équipements et services spatiaux.

Les entreprises spatiales canadiennes ne s'opposent pas à la concurrence tant qu'elle est juste, équilibrée et transparente. En fait, une plus grande concurrence bien gérée devrait profiter à la fois au gouvernement en tant qu'acheteur et au secteur spatial canadien, puisqu'elle stimulera l'innovation et donnera aux entreprises la possibilité d'établir une série de partenariats dans le cadre de la préparation des soumissions.

Il est recommandé que les processus d'approvisionnement en actifs et services spatiaux soient de nature concurrentielle et que les propositions soient évaluées en fonction de leur prix, de leur respect des exigences définies et de leur valeur industrielle et technologique pour le secteur spatial canadien.

Pour maintenir les coûts à un bas niveau, stimuler la créativité et conserver une solide capacité interne, toute entreprise ou tout consortium d'entreprises qui respecte un seuil important de contenu canadien devrait être autorisé à présenter des soumissions pour les contrats fédéraux dans le domaine spatial. Les soumissionnaires devraient être encouragés à proposer des solutions innovatrices afin de répondre aux besoins du gouvernement — ce qui sera plus facile si ces besoins ont été définis à un niveau relativement général, comme il est expliqué dans la recommandation précédente.

Chaque proposition devrait inclure une explication détaillée des avantages industriels et technologiques concrets pour le secteur spatial canadien. Les avantages peuvent découler de la participation directe d'entreprises et d'établissements de recherche canadiens en tant que responsables de la soumission ou partenaires dans la soumission, d'engagements fermes à acheter les systèmes et composantes à des entreprises canadiennes, et d'investissements dans la recherche et la formation axée sur les compétences se rapportant au projet. Les avantages prévus devraient être évalués en fonction de leur incidence sur les capacités technologiques du secteur spatial canadien et son aptitude à développer et à vendre des produits et services au Canada et à l'étranger. La sélection des soumissions devrait tenir compte de cette incidence, ainsi que du coût total de la soumission et de la capacité de répondre aux besoins des utilisateurs.

[traduction] « Les approvisionnements du gouvernement dans le domaine spatial devraient reposer sur les besoins à satisfaire ou les problèmes à régler.

[…] Une consultation étroite entre l'industrie et le gouvernement sur les besoins des utilisateurs et les capacités de l'industrie devrait avoir lieu d'emblée, avant l'établissement de toute spécification technique. Ce processus permettra à l'industrie de proposer, et au gouvernement d'évaluer, des solutions de rechange pour satisfaire les besoins des utilisateurs, ce qui favorisera l'innovation et réduira les coûts. »

Télésat, mémoire présenté dans le cadre de l'Examen de l'aérospatiale.

Lorsque les efforts visant à encourager une concurrence accrue ne portent pas leurs fruits et qu'il n'y a qu'un seul soumissionnaire — peut-être en raison d'exigences particulières du projet ou du nombre limité d'intervenants dans l'industrie —, il faudra peut-être prendre des mesures spéciales pour veiller à ce que les coûts soient raisonnables et que les avantages pour le secteur spatial canadien soient intéressants. Ces mesures peuvent inclure la comparaison du prix de la soumission avec le coût de projets comparables menés dans d'autres pays, ou l'augmentation du seuil de contenu canadien.

Dans tous les cas, le processus d'approvisionnement devrait être dirigé par Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC), l'organisme fédéral le plus expérimenté dans les grands achats gouvernementaux. L'ASC devrait fournir des avis techniques à TPSGC, conjointement avec tous les organismes participant au projet, et consulter TPSGC et le fournisseur pendant la conception et la fabrication pour s'assurer que les jalons sont respectés. Dans la plupart des cas, toutefois, l'ASC ne devrait pas participer directement à ces activités de conception et de fabrication. Il faudrait accorder moins d'importance à la surveillance technique continue exercée par l'ASC et se pencher davantage sur l'établissement et le respect des obligations contractuelles des entreprises en ce qui concerne le développement et la livraison des produits. Des pénalités importantes seraient imposées en cas de sous-rendement ou de non-rendement. Il devrait incomber aux entreprises soumissionnaires de proposer et de fournir les biens et les services. Le gouvernement devrait agir comme un client avisé plutôt que comme un superviseur omniprésent.


Notes en bas de page

  1. 4 Groupe d'étude sur les politiques en matière de concurrence, Foncer pour gagner : rapport final, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, Ottawa, 2008. (Retour à la référence de note en bas de page 4)

Partie 3
Analyse et recommandations (suite)

Chapitre 3.3
Stimuler la capacité technologique et commerciale

Bien que l'approvisionnement public contribue grandement à l'innovation et à la position concurrentielle du secteur spatial canadien, il ne constitue pas le seul outil à la disposition du gouvernement pour aider le secteur à prospérer. En fait, à mesure que les progrès technologiques et les tendances mondiales rendent l'espace de plus en plus viable sur le plan commercial, les politiques et programmes gouvernementaux devraient davantage viser à créer un environnement qui aide les entreprises spatiales canadiennes à réussir non pas seulement dans le contexte des approvisionnements gouvernementaux, mais aussi sur le marché mondial.

[traduction] « Sans les nouvelles technologies, les liens entre les universités de différents pays et les travailleurs dûment qualifiés passant des universités aux laboratoires de [recherche-développement] industriels puis aux programmes de vol, les entreprises canadiennes finiront par ne plus être à la fine pointe et elles perdront leur raison d'être et leur compétitivité sur la scène mondiale. La compétitivité du secteur repose sur une solide capacité de recherche dans des groupes ayant une masse critique, qui entretiennent des liens étroits avec l'industrie et le gouvernement. »

Janet E. Halliwell, Tim Barfoot, Kieren Carroll, Gabriele d'Eleuterio, James Drummond, Gordon Osinski et Andrew Yau, The Academic Dimensions of Industrial Competitiveness, rapport de recherche préparé pour le Groupe de travail sur l'espace, juin 2012.

Ce succès dépendra du perfectionnement continu des technologies et du développement de nouvelles technologies qui anticipent et comblent les besoins des clients des secteurs public et privé au Canada et à l'étranger. Il faudra également des conditions propices à la créativité et à l'expérimentation par les entrepreneurs et les chercheurs.

Recommandation no 7 : Soutien au développement technologique

Le gouvernement joue un rôle crucial dans la stimulation de l'innovation grâce au financement de la R-D. C'est l'une des raisons pour lesquelles le budget de 2012 a resserré les règles d'admissibilité au programme d'encouragements fiscaux pour la recherche scientifique et le développement expérimental (RS&DE) en faveur d'un soutien plus direct à des idées et projets prometteurs. Ce soutien est particulièrement important dans un secteur comme l'espace, où l'avantage concurrentiel et l'avantage technologique sont si étroitement liés.

Les principaux programmes fédéraux ciblant la R-D appliquée dans le secteur spatial canadien sont le Programme de développement des technologies spatiales (PDTS) et le Programme de développement d'applications en observation de la Terre (PDAOT) de l'ASC. Au fil des ans, la proportion de financement consacré au PDTS par l'ASC a diminué à mesure que les budgets ont été réduits et que les ressources ont été réaffectées à d'autres activités : l'Agence octroyait à ce programme un financement annuel de 10 à 20 millions de dollars entre 2003 et 2010, pour le ramener à 4 millions en 2011-2012. Le financement du PDAOT est demeuré relativement stable pendant la même période, soit environ 5 millions de dollars par an.

Programme de développement des technologies spatiales

Le Programme de développement des technologies spatiales (PDTS) offre un soutien financier à l'industrie et au milieu académique pour stimuler l'innovation, améliorer la compétitivité du secteur spatial canadien et poursuivre le développement de technologies qui pourraient être requises pour de futures missions spatiales canadiennes.

Pendant les 10 dernières années, le PDTS a appuyé le développement d'une cinquantaine de nouvelles technologies, allant des matériaux en fibres de carbone autorégénérantes aux systèmes automatisés de vision permettant l'inspection de la navette spatiale.

Par exemple, ABB de Québec a reçu 500 000 $ du PDTS pour développer un interféromètre miniature (appelé MINT), instrument qui module la lumière incidente de manière à permettre une analyse plus détaillée d'une scène en observation. Cette technologie peut être utilisée dans un large éventail d'applications, notamment les instruments de télédétection pour la surveillance de l'environnement, de la défense et de la sécurité ainsi que les analyseurs industriels. Grâce à d'autres activités de recherche-développement portant sur cette technologie, ABB a développé une nouvelle famille d'analyseurs industriels à haut rendement et à faible coût vendus en grand nombre sur les marchés étrangers.

Étant donné l'importance de l'innovation pour la viabilité à long terme du secteur et l'ampleur des investissements d'autres pays dans la R-D spatiale, le niveau de soutien à ces activités doit être augmenté et protégé.

Il est recommandé que le financement total alloué aux activités de développement technologique de l'Agence spatiale canadienne soit augmenté de 10 millions de dollars par an au cours des trois prochaines années, puis qu'il soit maintenu à ce niveau.

La moitié de la hausse de financement recommandée devrait provenir d'une réaffectation des économies réalisées par suite du resserrement des critères du crédit d'admissibilité au programme de RS&DE, et l'autre moitié devrait être réaffectée des secteurs d'activité de l'ASC qui seront moins actifs par suite des recommandations formulées dans le présent rapport, notamment la supervision directe du processus de conception et de fabrication des actifs spatiaux.

Lorsque des fonds publics sont dépensés dans le but de stimuler des technologies novatrices, il importe que le soutien cible les secteurs les plus aptes à améliorer la compétitivité de l'industrie et à contribuer à la croissance de l'économie. À cette fin, les critères de financement de la R-D spatiale devraient accorder la préférence aux propositions qui :

Ballons scientifiques de haute altitude

L'ASC travaille en partenariat avec le Centre national d'études spatiales (l'agence spatiale française) et des administrations municipales afin de construire et d'exploiter une base à Timmins, en Ontario, à partir de laquelle des ballons scientifiques de haute altitude pourront être lancés. Les ballons peuvent emporter jusqu'à 1,5 tonne de matériel dans la stratosphère — à une altitude d'environ 40 kilomètres — pour recueillir des données sur l'environnement et l'atmosphère, ainsi que pour observer l'espace à l'aide de télescopes. Cette base de lancement offrira des possibilités rentables d'effectuer des recherches et de former la prochaine génération de chercheurs et d'ingénieurs dans le domaine spatial. Les préparatifs en vue du premier lancement devraient avoir lieu en 2013.

  • respectent les priorités du Programme spatial canadien approuvées par le Cabinet;
  • sont présentées par des consortiums regroupant l'industrie et des institutions académiques qui ont signé des ententes de partage de la propriété intellectuelle;
  • prévoient une démonstration de technologie ainsi qu'une R-D fondamentale;
  • incluent un solide plan d'affaires démontrant comment les activités proposées de développement de technologie déboucheront sur des produits et services commercialement viables et exportables;
  • ont un plan de gestion de projet clairement formulé, qui prévoit idéalement un certain partage des dépenses et des risques par les promoteurs.

L'évaluation des propositions devrait être effectuée conjointement par l'ASC et le CNRC, qui possède une expertise en ce qui a trait à la recherche industrielle et à l'offre d'aide aux petites et moyennes entreprises pour qu'elles développent des technologies qui présentent un potentiel élevé de commercialisation et de vente sur les marchés mondiaux. Une collaboration plus officielle entre les responsables des programmes du CNRC et ceux des programmes de développement technologique de l'ASC devrait également être envisagée.

Recommandation no 8 : Encouragement de l'activité spatiale commerciale

L'industrie spatiale mondiale s'ouvre petit à petit aux activités commerciales autres que les télécommunications par satellite. Les efforts déployés par la NASA pour stimuler le développement des services commerciaux de lancement en basse orbite et en devenir client éventuel constituent un élément moteur de cette tendance, tout comme la popularité croissante des applications reposant sur les données satellitaires, le développement de nouvelles technologies meilleur marché pour lancer des actifs dans l'espace et les exploiter, ainsi que l'intérêt de chercheurs et investisseurs sérieux pour le tourisme spatial, l'exploitation minière dans l'espace, les services de ravitaillement en carburant et d'entretien des satellites, la gestion des débris spatiaux et la récupération de l'énergie solaire dans l'espace aux fins d'utilisation sur Terre.

Bien que certaines de ces idées puissent s'avérer extravagantes, d'autres pourraient être visionnaires et produire d'énormes avantages pour leurs promoteurs et les pays où ils exercent leurs activités. Le soutien à la R-D recommandé ci-dessus aidera à encourager le développement des propositions les plus prometteuses, mais il est impossible de savoir avec certitude si une idée qui semble irréaliste aujourd'hui pourra donner lieu à une percée demain. Sans approuver des projets théoriques particuliers, les politiques et programmes publics peuvent créer les conditions pour que les entrepreneurs et les chercheurs mettent à l'essai et adoptent des approches créatives et, ce faisant, donnent une impulsion à l'activité du secteur spatial privé canadien à un moment où les affaires dans l'espace commercial prennent de l'ampleur.

L'espace commercial d'aujourd'hui et de demain

Quoique relativement modeste, l'activité spatiale privée à but lucratif prend de l'expansion. En voici quelques exemples :

Au Canada, exactEarth, une filiale de COM DEV, a mis au point un service de données de système d'identification automatique (SIA) utilisant la technologie des microsatellites et des nanosatellites. Il peut être utilisé pour surveiller le transport maritime et les pêches au-delà des eaux côtières. Il existe un vaste marché potentiel pour cette technologie, puisqu'elle pourrait intéresser les responsables de la surveillance et de la sécurité maritime ainsi que les sociétés de transport maritime qui souhaitent assurer un meilleur suivi de leur flotte. Récemment, le ministère de la Défense nationale a commencé à utiliser le SIA d'exactEarth pour fournir des renseignements et des données en temps réel sur la sécurité aux Forces canadiennes.

***

La société américaine Solaren développe actuellement un système de satellites qui produira de l'électricité à partir de panneaux solaires en orbite et la renverra sur Terre à une station de réception sous forme de micro-ondes. Les panneaux solaires spatiaux ont l'avantage de pouvoir produire de l'énergie sans interruption attribuable à la nuit, à la couverture nuageuse ou aux variations du vent, tout en évitant les effets filtrants des gaz atmosphériques. L'entreprise a déjà conclu un contrat avec Pacific Gas and Electric Company, important service public de transport d'électricité en Californie, en vue de fournir environ 1 700 GWh par an pendant 15 ans, soit assez d'électricité pour alimenter chaque année quelque 250 000 foyers. Le coût de l'électricité devrait être concurrentiel par rapport à celui d'autres sources renouvelables. Solaren a l'intention de commencer à fournir l'électricité dès 2016.

***

Au Royaume-Uni, Virgin Galactic entend offrir des vols spatiaux suborbitaux à des touristes de l'espace, des lancements suborbitaux pour des missions scientifiques spatiales et des lancements orbitaux de petits satellites. Dans un avenir plus lointain, elle espère offrir des vols spatiaux habités orbitaux et transcontinentaux.

À ce jour, plus de 540 clients ont versé chacun un acompte sur un billet évalué à 200 000 $ pour faire un tour de deux heures à bord de SpaceShipTwo, avion spatial de Virgin Galactic. L'entreprise s'est fixé comme objectif de commencer à envoyer des touristes aux confins de l'espace dès 2013, si les vols d'essai de l'avion-fusée sont concluants.

Il est recommandé que, lorsque les coûts sont modiques et qu'il n'existe aucun risque pour la sécurité publique, le gouvernement crée des conditions propices à l'expansion de l'activité commerciale dans le domaine spatial.

Diverses mesures aideront à créer ces conditions. Elles devront évoluer en même temps que les technologies spatiales et la dynamique du secteur. Les mesures qui valent la peine d'être envisagées immédiatement sont les suivantes :

  • Redoubler d'efforts pour obtenir des créneaux orbitaux géostationnaires pour les satellites appartenant à des intérêts canadiens. Comme l'espace est considéré comme un patrimoine mondial, seul le gouvernement peut négocier l'accès à ces créneaux et les mettre à la disposition d'entreprises privées.
  • Simplifier les régimes de réglementation qui couvrent les essais en haute altitude, les lancements suborbitaux et orbitaux et les vols spatiaux habités. Ces régimes doivent atténuer les risques inhérents à ces activités, mais un certain rajustement peut être utile en fonction des progrès technologiques et du désir d'encourager une expérimentation sécuritaire.
  • Mettre l'infrastructure publique, que ce soit les laboratoires de l'ASC et du CNRC dans de grandes villes ou les pistes peu utilisées dans des endroits isolés, à la disposition des entreprises à un coût modeste afin qu'elles puissent tester en toute sécurité de nouvelles technologies spatiales.
  • Adopter une politique sur l'accès ouvert aux données brutes non sensibles sur le plan de la sécurité qui sont produites par les satellites appartenant à des intérêts publics, en particulier ceux voués à l'observation de la Terre. Cette politique serait conforme aux tendances mondiales et au Plan d'action du Canada pour un gouvernement ouvert, et permettrait aux personnes et entreprises créatives d'ajouter de la valeur et de générer une activité économique en développant et en vendant une variété d'applications.
  • Étendre le traitement fiscal préférentiel dont jouissent actuellement ceux qui investissent dans des actions accréditives d'entreprises d'exploration minérale à ceux qui investissent dans l'activité commerciale spatiale, qu'elle soit ou non associée à l'exploitation minière. Même s'il est probable que peu de personnes se prévalent de cette mesure à court terme, elle pourrait encourager les efforts du secteur privé à long terme.
  • Conclure des ententes sectorielles bilatérales qui accroissent l'accès de l'industrie spatiale canadienne aux marchés mondiaux, notamment aux achats des gouvernements à l'étranger, conformément à la recommandation no 8 du volume complémentaire sur l'aérospatiale. Ces ententes permettraient de veiller à ce que l'application de toute exemption aux règles commerciales internationales normales soit strictement limitée aux technologies et produits spatiaux réellement critiques pour la sécurité.

Partie 3
Analyse et recommandations (suite)

Chapitre 3.4
Prochaines étapes pour l’Agence spatiale canadienne

L'Agence spatiale canadienne a été créée en 1989, conformément à une recommandation formulée dans le rapport Chapman de 1967, qui jetait les bases du Programme spatial canadien. Les responsabilités de l'Agence, énoncées dans la Loi sur l'Agence spatiale canadienne, sont définies en des termes très généraux.

Vingt-trois années se sont écoulées, et le présent rapport renferme des recommandations qui se traduiront par d'importants changements pour l'ASC. Compte tenu de l'expérience des 25 dernières années, du développement du secteur spatial canadien et de l'évolution de l'industrie spatiale mondiale, ces recommandations clarifieront le mandat principal de l'ASC.

Si ces recommandations sont mises en œuvre intégralement, l'ASC concentrera ses efforts sur ce qui suit :

  • Fournir des avis et un soutien au ministre de l'Industrie, au conseil consultatif canadien dans le domaine spatial et au conseil de gestion du programme spatial formé de sous-ministres, dont le vice-président sera le président de l'ASC.
  • Faire office de conseiller technique auprès des comités de gestion de projet et de TPSGC dans le contexte des grands achats dans le domaine spatial, ainsi qu'auprès des ministères et organismes gouvernementaux de façon plus générale sur les utilisations des données et actifs spatiaux.
  • Négocier des accords de collaboration avec les agences spatiales d'autres pays, et coordonner la participation du Canada à des projets spatiaux internationaux.
  • Gérer, en collaboration avec le CNRC, l'allocation du financement accru à l'appui du développement de la technologie spatiale ainsi qu'effectuer ses propres recherches en collaboration avec l'industrie et les institutions académiques.
  • Continuer d'exploiter les actifs spatiaux publics et l'infrastructure terrestre connexe dont elle a la charge.
  • Diriger le Programme des astronautes canadiens.

Par ailleurs, conformément à la recommandation no 15 du volume complémentaire, Au-delà de l'horizon : les intérêts et l'avenir du Canada dans l'aérospatiale, l'ASC aidera à encourager les jeunes Canadiens à poursuivre des études et à faire carrière dans le secteur spatial.

Un meilleur encadrement du rôle de l'ASC signifie que celle-ci ne sera pas une organisation définissant des orientations de politiques et que, de manière générale, elle ne participera pas directement à la conception ou à la fabrication des actifs spatiaux achetés par le gouvernement.

Toute organisation investie d'une mission claire est vouée au succès. L'ASC tirera parti d'un mandat bien défini et d'un nombre adéquat d'employés possédant le bon ensemble de compétences pour mener à bien ce mandat.

Partie 4
Conclusion

L'activité humaine dans l'espace privilégie de plus en plus les applications pratiques et l'activité commerciale au détriment de l'exploration. Dans un avenir prévisible, les États-nations demeureront les principaux clients des projets spatiaux, notamment pour la découverte scientifique, l'observation de la Terre et les services publics. Toutefois, un nombre croissant d'entreprises vendant à profit des activités et services spatiaux leur emboîteront le pas.

L'espace est devenu indispensable au fonctionnement des sociétés contemporaines en raison des progrès technologiques, principalement en ce qui concerne la capacité des satellites. Les actifs spatiaux rendent la vie sur Terre plus productive, prospère, sûre et intéressante. La valeur de l'activité spatiale — sur le plan commercial et grâce à sa contribution au bien public — augmentera rapidement dans les années à venir.

Le Canada doit absolument exploiter ses forces dans le domaine spatial et s'assurer que son secteur spatial est dans le peloton de tête de ce qui est devenu une course internationale en vue de trouver de nouveaux moyens d'utiliser l'espace pour procurer un avantage à la population et des gains au secteur privé, sans quoi il renoncerait à des possibilités qui ne se représenteront jamais. Nos intérêts nationaux, notamment dans le Nord et le long de notre périmètre de sécurité, exigent un éventail d'applications et d'équipements spatiaux. Nos entreprises spatiales devraient vendre au monde entier des services et des concepts de pointe. Notre économie devrait tirer parti des emplois de qualité, des possibilités d'investissement ainsi que des innovations technologiques et des retombées des projets spatiaux. En outre, nos chercheurs et nos jeunes devraient être motivés par la possibilité de contribuer aux connaissances fondamentales et à l'amélioration de la condition humaine en étudiant ou en faisant carrière dans le domaine spatial.

Pour tirer parti de ces possibilités, il faut avant tout établir clairement les priorités aux plus hauts niveaux pour le Programme spatial canadien, après quoi les énergies créatrices et les ressources des organismes gouvernementaux, de l'industrie et des milieux académique et de la recherche pourront être utilisées comme il se doit. Des structures de gestion et des plans solides sont nécessaires pour bien canaliser les énergies à l'appui de ces priorités. Une démarche d'approvisionnement public soigneusement élaborée s'impose pour trouver un juste milieu entre l'importance accordée au renforcement des capacités technologiques et commerciales du secteur spatial canadien et les considérations relatives à l'optimisation des ressources. De plus, l'esprit concurrentiel de l'industrie spatiale canadienne doit être à la hauteur de son ingéniosité manifeste.

Le Canada a déjà accompli de grandes réalisations dans l'espace. En redéfinissant clairement ses objectifs et en adoptant une gestion ciblée, il pourra même se surpasser. Pour le bien des générations futures de Canadiens, il est temps d'atteindre de nouveaux sommets.

Appendice A
Liste des rapports de recherche

Les rapports de recherche répertoriés ci-après ont été commandés dans le cadre de l'Examen de l'aérospatiale pour obtenir de l'information et des avis sur des questions clés. La version intégrale de ces rapports se trouve sur le site Web de l'Examen, dans la section « Recherche et consultations ».

Ces rapports sont disponibles seulement dans la langue dans laquelle ils ont été soumis. Ils ne sont pas assujettis aux exigences relatives aux langues officielles, à la protection des renseignements personnels ou à l'accessibilité.

L'Examen de l'aérospatiale n'est pas responsable de l'exactitude, de la fiabilité ou de l'actualité de l'information fournie par des sources externes. Les lecteurs qui souhaitent utiliser cette information devraient consulter directement les auteurs.

 

Aerospace Export and Domestic Controls Review, Advantage Trade Controls Ltd.

Aerospace Small and Medium Sized Enterprises Financing, Patrick Hum, MBA Candidate, Université Queen's

Approaches to In-service Support (ISS), Optimized Weapon System Support (OWSS) and Single Point of Accountability (SPA), Cogint

Brazil, Russia, India and China Governments' Aerospace Strategies and National Policies: Implications to Canada's Aerospace Industry, Pravco Aviation Review L.L.C.

Canada's Aerospace Industry: The Impact of Key Global Trends, Conference Board du Canada

Canada's Space Sector: The Essential Enabler of Canada's Northern Strategy, Norstrat Consulting

Current and Future Human Capital Needs in the Aerospace Industry and Strategies for Harnessing the Potential Workforce, Prism Economics and Analysis

Defence Industrial Policy Approaches and Instruments, Ugurhan Berkok, Christopher Penney et Karl Skogstad, Université Queen's

International Overview of Space Governance and Policies for the Canadian Aerospace Review, Euroconsult

Policies and Programs of Canadian Provinces and Territories: Mechanisms to Support SMEs and Established Aerospace Firms, Acacia Policy Consulting Inc.

R&D Support for the Aerospace Industry: A Study of Eight Countries and One Region, Jorge Niosi, Université du Québec à Montréal

A Report on the Development of a National Space Infrastructure to Support the Global Competitiveness of the Canadian Space Industry, Lansdowne Technologies Inc.

A Research Assessment Report on Integrated Technology Demonstration and the Role of Public Policy, Jeff Xi, Ryerson Institute for Aerospace Design and Innovation

Sectoral Structure Analysis, PricewaterhouseCoopers

The State of the Canadian Space Sector, Hickling Arthurs Low

Strategies for Attracting and Retaining a Skilled Workforce in a Cyclical Industry, John O'Grady Consulting Ltd.

Appendice B
Liste des mémoires

Des mémoires écrits ont été reçus par l'Examen de l'aérospatiale de la part des organisations et des personnes énumérées ci-après. Le texte complet de ces mémoires peut être consulté sur le site Web de l'Examen, dans la section « Recherche et consultations ».

Ces mémoires sont disponibles seulement dans la langue dans laquelle ils ont été soumis. Ils ne sont pas assujettis aux exigences relatives aux langues officielles, à la protection des renseignements personnels ou à l'accessibilité.

L'Examen de l'aérospatiale n'est pas responsable de l'exactitude, de la fiabilité ou de l'actualité de l'information fournie par des sources externes. Les lecteurs qui souhaitent utiliser cette information devraient consulter directement les auteurs.

 

Association des anciens étudiants canadiens de l’Université internationale de l’espace

Association des industries canadiennes de défense et de sécurité

Association internationale des machinistes et des travailleurs et travailleuses de l’aérospatiale

BlackBridge

Canada 2020

Canadian Nanosatellite Workshop

Canadian Satellite Design Challenge Management Society

Canadian Space Commerce Association

Canadian Space Society

COM DEV International

de Carufel, Guy

DreamSpace Group

Gedex

ISR Technologies

JMJ Aéronautique

Lark, Eva-Jane

Montréal International

Prentice, Barry E.

SAR Corporation

Space 1 Systems

Télésat

Travailleurs et travailleuses canadiens de l'automobile